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non moins épineuse destinée. » « Il doit se ménager, lui écrivit la Reine à cette époque où il était souffrant, — car nous y tenons beaucoup, et je sais en quoi il peut m’être utile encore, et je le choisis pour une chose dans laquelle personne ne peut l’égaler, et d’où dépend toute ma félicité d’ici-bas et mon plaisir, ainsi que le plaisir et la félicité de beaucoup d’autres… » C’est par une notice ultérieure du Journal qu’on sait de quoi il s’agissait : on voulait confier à Jean-Joseph le poste d’ajo (gouverneur) et de grand maître de la cour de l’archiduc-héritier Joseph. Il dut faire valoir de nombreuses considérations contre ce projet avant de réussir à faire revenir Marie-Thérèse sur cette décision.

On s’adressa alors au dévouement de Khevenhüller pour remplir une autre tâche délicate, et cette fois il était impossible de s’y refuser : c’était son envoi en mission à Dresde.

On savait à la cour de Vienne, depuis l’été de 1744, que le roi de Prusse avait l’intention, quoique la paix fût conclue, d’envahir la Bohême. Ce fut ce qui décida Marie-Thérèse à s’occuper, non seulement de reprendre la Silésie à Frédéric II, mais encore d’affaiblir ce prince, afin qu’il n’eût plus la force de continuer ses brigandages. Les négociations qui eurent lieu à ce moment entre Vienne et Dresde décèlent des sentimens plutôt belliqueux que pacifiques chez la reine de Hongrie et expliquent la résolution que prit bientôt la souveraine impétueuse d’envoyer l’homme de sa confiance à Dresde au moment décisif. Elle ordonna d’ailleurs en même temps que tous les rapports de son envoyé et tous les documens des conférences précédentes lui fussent communiqués. Leur étude prépara Jean-Joseph à entrer au ministère.

Le 20 janvier 1745, mourut Charles VII, « le fantôme d’empereur. » Entraînée par l’espoir du succès, Marie-Thérèse travailla alors avec sa vivacité et son énergie coutumières à la réalisation de son plus ardent désir : faire monter son époux sur le trône impérial. Et Jean-Joseph se résigna au « sacrifice » d’accepter de nouveau le poste de second ambassadeur-électeur du « Kur » de Bohême. Mais, en juin, il fut informé qu’il devait se rendre d’abord à Dresde et à Hanovre.

Dans l’espoir d’agrandissemens territoriaux considérables, la Saxe s’était rangée du côté du roi de Prusse : toutefois, les préliminaires de paix de Breslau ne lui donnèrent aucune