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M. Doumer y est présenté comme un informateur habituel du Saint-Siège : au cours de ses relations intimes avec le Pape et Mgr Merry del Val, il leur aurait envoyé son Livre de mes fils. L’incident n’est que ridicule : il s’est dénoué, entre M. Doumer et M. Clemenceau, dans un échange de lettres où l’avantage n’est pas resté à ce dernier. Ce qui est plus grave, c’est que les pièces du dossier ont été numérotées et paraphées, non point par le juge d’instruction, mais par les traducteurs dont nous venons de parler, qui n’avaient pour cela aucune qualité. Des pièces manquent, parait-il. Le dossier porte la trace d’une manipulation maladroite ou trop habile, on ne sait ; toutes les suppositions sont permises. Combien M. Clemenceau n’en ferait-il pas s’il était encore simple journaliste, et de quelle verve implacable n’en assaisonnerait-il pas l’amertume ! Quant à nous, ce qui nous étonne le plus, c’est l’étonnement scandalisé de la Commission parlementaire. Le fait même qu’elle est saisie des papiers Montagnini n’est-il pas pour elle une preuve manifeste et suffisante qu’il ne s’agit pas là d’une affaire judiciaire, mais d’une affaire politique ? Elle s’indigne parce qu’une des règles élémentaires de la procédure criminelle n’a pas été observée ; mais les autres l’ont-elles été davantage, et n’est-il pas de notoriété publique qu’elles ont toutes été violées ? Les pièces n’ont pas été correctement numérotées et paraphées : la belle affaire ! La Commission s’est-elle demandé comment elles ont été saisies, comment elles ont été dépouillées en l’absence du prévenu, comment celui-ci a été mis dans l’impossibilité d’en connaître et de se défendre ? La magistrature, à sa grande honte, a couvert de sa robe une œuvre de basse police ; sachant très bien ce qu’elle faisait, elle n’a pas pris la peine d’y mettre les formes. Elle a rendu un service, sans doute en rougissant, et n’a eu d’autre préoccupation que d’en finir au plus vite. Elle s’est vengée de sa complaisance par ses négligences. Est-ce qu’on lui demandait de faire œuvre de justice ? Est-ce que Mgr Montagnini était vraiment suspect d’avoir comploté avec M. l’abbé Jouin ? Est-ce qu’on voulait autre chose que les papiers de la nonciature ? On a fait, depuis, ce qu’on a voulu de ces papiers : la justice s’en est désintéressée, et c’est un commencement de châtiment que le désordre dans lequel ils sont arrivés devant la Commission. Celle-ci s’émeut à tort, en s’y prenant si tard. En fait d’arbitraire, un peu plus ou un peu moins ne tire pas à conséquence : il aurait fallu protester contre l’arbitraire lui-même et contre la violation de toutes les convenances internationales. Alors on aurait soutenu la Commission parlementaire ; on se serait intéressé à ses découvertes. Mais ses