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à leur politique turcophile intransigeante, ils n’ont consenti à se charger d’aucun district : ils se sont contentés d’envoyer un seul officier, le major von Alten, à qui a été confiée la direction de l’école de gendarmerie créée à Salonique. Ainsi, quand revient la belle saison, les officiers, les agens civils sont à leur poste : le programme de Mürzsteg est en pleine exécution et l’on est d’autant plus fondé à espérer une pacification générale que la Turquie vient de signer, le 28 mars/8 avril, avec la Bulgarie, un accord, négocié à Constantinople par M. Natchevitch, qui met fin à la période de tension entre les deux pays. Il stipule le renvoi simultané dans leurs foyers des troupes mobilisées et, pour les Macédoniens réfugiés dans la principauté, l’amnistie et la faculté de rentrer dans leur pays ; le gouvernement bulgare s’engage à s’opposer à la formation des comités et des bandes. De chaque côté, les troupes mobilisées sont licenciées ou éloignées de la frontière. L’été de 1904 s’annonçait donc sous d’heureux auspices.


V

Nous arrivons ici à la troisième phase de l’action européenne en Macédoine. Dans la première, l’Autriche-Hongrie et la Russie interviennent seules, munies d’une sorte de blanc-seing de l’Europe, en tant que « puissances les plus directement intéressées. » Dans la seconde, elles continuent à paraître au premier plan, mais leur nom devient, pour ainsi dire, la raison sociale d’une entente européenne où l’influence anglaise se fait de plus en plus sentir ; dans la troisième enfin, nous allons voir les six grandes puissances agir ensemble, avec un accord apparent qui cache de profondes dissidences, pour instituer en Macédoine de nouveaux organes de contrôle.

L’été 1904 s’écoula, comme on l’espérait, sans secousses trop violentes. « Il n’y a plus eu d’insurrection ouverte, ni de dévastations de grande étendue, écrivait le 2 novembre, M. Bapst ; mais le mal, en présence duquel nous nous trouvons aujourd’hui, est peut-être pire, car une insurrection est toujours susceptible d’être réprimée par les armes, tandis que l’agitation actuelle, qui se manifeste à la fois sur les points les plus divers par des crimes et des brigandages isolés, échappe à l’action des troupes et ne peut être efficacement combattue par la police et