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les origines et d’en expliquer le sens, nous la définissions : « Un compromis entre la politique aventureuse d’intervention et la politique terre à terre des intérêts, » et nous nous demandions « si elle n’était pas, en définitive, quelque illusoires qu’en soient parfois les résultats, la seule réalisable, et si elle n’offrait pas la seule conciliation possible entre une justice idéale, et d’ailleurs mal définie, et la réalité quotidienne des solutions pratiques. » La politique des réformes existe depuis que, pour la première fois, une puissance extérieure s’est interposée entre l’arbitraire du conquérant et l’esclavage des vaincus ; elle remonte aux premières « Capitulations » où les rois de France stipulaient des garanties en faveur des chrétiens de l’empire ottoman. De ce premier embryon, peu à peu, est sorti tout un droit. M. Schopoff, le très distingué agent commercial de Bulgarie à Salonique, a eu l’heureuse idée de réunir en un volume[1]les principaux textes qui constituent le dossier de la politique des réformes, la charte des populations chrétiennes de Turquie ; nulle part mieux qu’on feuilletant ces documens on ne se rend compte qu’il existe, malgré des contradictions de détail, une continuité de la politique européenne dans l’empire ottoman, et qu’en dépit de ses lenteurs, des résultats considérables ont été obtenus.

La Conférence de Constantinople qui précède la guerre de 1878, et le traité de Berlin qui la suit, stipulent des réformes en faveur des provinces de la Turquie d’Europe destinées à rester sous l’autorité directe du Sultan. A la base de toutes les réformes en Macédoine, il faut placer l’article 23 du traité de Berlin, dont il est bon de rappeler le texte :


ART. 23. — La Sublime-Porte s’engage à appliquer scrupuleusement dans l’île de Crète le règlement organique de 1868, en y apportant les modifications qui seraient jugées équitables.

Des règlement analogues, adaptés aux besoins locaux, sauf en ce qui concerne les exemptions d’impôts accordées à la Crète, seront également introduites dans les autres parties de la Turquie d’Europe pour lesquelles une organisation particulière n’a pas été prévue par le présent traité.

La Sublime-Porte chargera des commissions spéciales, au sein desquelles l’élément indigène sera largement représenté, d’élaborer les détails de ces nouveaux règlemens dans chaque province.

Les projets d’organisation résultant de ces travaux seront soumis à

  1. A. Schopoff, les Réformes et la protection des chrétiens en Turquie, 1673-1904. Paris, Plon, 1901, in-8o.