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attenant à son bien une maison d’habitation dont la cote n’est nullement dégrevée, la réduction qu’on lui accorde est tout à fait minuscule ; elle tombe, en ce qui concerne les revenus fonciers ruraux de 300 francs ou au-dessous, à 12 ou 15 p. 100 de la cote foncière totale actuelle, pour les revenus de 301 à 400 francs à 7 ou 8 p. 100 et pour ceux de 401 à 500 francs à 4 ou 5 p. 100. Encore faut-il, pour bénéficier de ces maigres réductions, que le contribuable fasse la preuve qu’il ne possède pas d’autres ressources que celles de l’exploitation de sa petite propriété ; si, par conséquent, ce qui est le cas d’un très grand nombre, ce petit propriétaire fait quelques journées chez autrui, s’il se livre à un petit commerce quelconque, s’il a donné en location quelque lopin de terre ou quelque masure, ou bien s’il possède une obligation, une action ou une rente ou une retraite quelconque, il perd le bénéfice de ces réductions minuscules.

On a fait quelque bruit autour d’une expérience tentée devant le ministre et les membres de la Commission des réformes fiscales dans une petite commune du département de l’Oise, Rochy-Condé. Tous les fonctionnaires locaux de l’administration des finances s’y étaient réunis, et avaient à l’avance préparé le terrain ; ils s’étaient livrés à une nouvelle évaluation des parcelles : il en résulta, nous dit-on, une réduction sensible pour la généralité des petits propriétaires : cette réduction fait assez bonne figure parce qu’on ne la rapporte qu’au principal de l’impôt perçu par l’État, mais en la comparant à la cote totale (part de l’État et centimes locaux réunis), elle tombe aux proportions insignifiantes que nous venons d’indiquer. Aussi, les petits et moyens propriétaires de Rochy-Condé paraissent-ils avoir accueilli sans enthousiasme la réduction qu’on faisait luire à leurs yeux de quelques dizaines de centimes ou, au grand maximum, de 2 ou 3 francs de leurs cotes, et s’être plus alarmés des intrusions qu’ils ont pressenties pour la constatation de leurs ressources diverses ; ils se sont donc tenus sur une réserve fort explicable. Si l’on juge qu’il y a lieu d’accorder quelque allégement aux propriétaires de ces catégories, on pourrait le leur allouer sans bouleverser tout notre système fiscal.

Il est remarquable que, dans cette expérience de Rochy-Condé, on ait laissé de côté la cinquième cédule ou catégorie, colle des bénéfices de l’exploitation agricole ; c’est là une innovation singulièrement délicate et aventureuse dans un pays de