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L’Einkommensteuer prussien n’a aucunement cette qualité ; le revenu du contribuable, après avoir, pendant presque tout le cours du XIXe siècle, été, en Prusse, taxé d’office d’après les renseignemens plus ou moins sûrs que les agens du lise pouvaient se procurer, est depuis 1891 assis sur la déclaration que le contribuable doit faire obligatoirement de ses revenus, déclaration qui donne souvent lieu à une discussion entre lui et les agens du lise ou les commissions d’assiette. C’est donc sur le revenu global que l’impôt prussien est établi ; il autorise des investigations minutieuses ; le taux en est, d’ailleurs, modéré, quoique légèrement progressif ; il est de 3 p. 100 approximativement pour les revenus moyens et de 4 p. 100 uniformément pour tous les revenus dépassant 100 000 marks ou 125 000 francs. Le taux en est très stable et ne s’est aucunement modifié depuis une quinzaine d’années. On sait quel est l’esprit de discipline et de docilité qui règne en Prusse : « Ici, disait Bismarck, nous naissons tous avec une tunique » ; c’est-à-dire, nous avons tous l’esprit et le caractère d’employés, sinon de soldats. Ces habitudes de soumission qui caractérisent la population prussienne, se joignant à l’ancienneté, à la modération et à la stabilité de la taxe, font que, tout en soulevant des contestations assez nombreuses dans les cas particuliers, cet impôt se perçoit dans ce pays avec résignation.

M. Caillaux, dans son projet de loi, a voulu fondre l’Income tax cédulaire britannique et l’Einkomniensteuer global de la Prusse ; il n’est guère arrivé qu’à cumuler, comme on le verra, les défauts graves de l’un et de l’autre système, au point de rendre son projet absolument inacceptable.


VI

D’après l’énoncé du projet, le nouvel impôt sur le revenu supprimerait et remplacerait nos cinq contributions directes ainsi que les taxes sur le revenu et sur la transmission des valeurs mobilières. Mais il y a là une équivoque qui induit en erreur un grand nombre de personnes : ce n’est pas intégralement les cinq contributions directes que le nouvel impôt remplacerait, mais seulement la part de l’Etat dans ces cinq contributions ; il laisserait subsister celles-ci pour la part des localités. Or, il ne faut pas oublier que les centimes additionnels locaux