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Le système d’impôts réels qu’elle établit visait le revenu, en s’efforçant de le saisir à sa source : tel était l’objet de la contribution foncière, de la contribution des patentes, de la contribution des portes et fenêtres et de la contribution personnelle et mobilière ; ces taxes étaient conçues comme ne devant laisser échapper aucun revenu et, d’autre part, comme devant éviter les doubles emplois. On avait établi une échelle de correspondance des loyers avec les revenus, d’après laquelle, pour les loyers considérables, le revenu était supposé équivalent à douze fois le montant du loyer. Cette échelle de correspondance des loyers et des revenus pouvait, sur quelques points, manquer d’exactitude ou prêter à critique ; mais la volonté du législateur d’atteindre ainsi proportionnellement les revenus était parfaitement démontrée ; d’autre part, afin d’éviter les doubles emplois, le contribuable pouvait être déchargé de la contribution mobilière dans la mesure où il prouvait qu’il avait déjà payé la contribution foncière, son revenu ayant déjà été atteint par celle-ci.

Ce système était ingénieux ; il évitait l’inquisition et l’arbitraire ; il laissait toute liberté au contribuable ; il ne se piquait pas de la recherche de l’absolu que l’on ne peut jamais atteindre ; il taxait les revenus d’une façon suffisamment approximative pour éviter les injustices nombreuses ou criantes, et il assurait au fisc des ressources certaines échappant à toute dissimulation et à tout mécompte.

Tel était le régime fiscal, établi par la Révolution française, en haine des impôts personnels sur le revenu de l’Ancien Régime : taille, dixièmes, vingtièmes, capitations graduées, etc. Les pays du centre de l’Europe, qui ne subirent pas de transformation radicale et méthodique comme celle que constitue la Révolution française, gardèrent leurs taxes d’ancien régime ; et ce sont ces taxes, modifiées sans doute et un peu améliorées, que l’on propose aujourd’hui étourdiment à notre approbation et à notre imitation.

L’Income tax britannique, impôt sur le revenu en Angleterre, a eu une origine un peu différente. Il fut établi une première fois en 1798, pour faire face aux frais de la guerre contre la France, — un bill, sur la proposition de Pitt, « accordant à Sa Majesté une aide et une contribution pour la continuation de la guerre. » — puis aboli à la paix d’Amiens ; rétabli à la reprise des hostilités en 1803, il fut aboli de nouveau, à la fin des guerres contre la