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au contraire, des faveurs et même une immunité complète aux petites distilleries, avec le régime des bouilleurs de cru.

Ce n’est pas seulement pour les impôts sur les objets de consommation que la pratique des peuples civilisés persiste à différer et ne montre aucune tendance à l’uniformité, c’est aussi pour les impôts sur la richesse. Tel peuple a des droits énormes sur les successions ; c’est le cas de l’Angleterre et de la France, les tarifs extrêmes étant, toutefois, sensiblement plus élevés chez nous que dans la Grande-Bretagne ; tel autre peuple, comme la Prusse et différens cantons suisses, ne grèvent d’aucune taxe les successions en ligne directe. Tel peuple frappe les transmissions d’immeubles de taxes écrasantes, comme le fait la France ; tel autre, comme l’Angleterre, ne les soumet qu’à des taxes très légères. Nous pourrions pousser bien plus loin cette démonstration. La diversité fiscale existe et se maintient, si elle ne s’accentue, d’un pays à un autre ; aucune nation ne juge à propos de rompre avec ses traditions, ses habitudes, ses goûts, de surmonter ses répugnances, pour adopter un patron uniforme de fiscalité. Chacun consulte avec raison ses particularités sociales et son tempérament national.

L’argument que l’impôt général et personnel sur le revenu existe chez différens peuples pour prétendre l’introduire en France n’a donc aucune force, puisque cette uniformité qu’on réclame sur ce point particulier, on la repousse sur tous les autres points, aussi bien en matière de constitution politique ou d’organisation administrative que d’impôts de consommation ou de droits d’enregistrement.


II

Si les partis dits avancés, qui sont souvent inconsciemment des partis rétrogrades, se rendaient compte des origines véritables des impôts généraux sur le revenu existant dans divers pays, ils témoigneraient à leur égard moins d’enthousiasme et éprouveraient même quelque confusion.

L’origine des impôts généraux et personnels sur le revenu, tels qu’on les trouve à l’heure actuelle en Allemagne et dans divers cantons suisses, par exemple, est absolument moyenâgeuse. Ce sont, légèrement modifiées, des taxes qui existaient il y a des centaines d’années. Le moyen âge et le début des