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partis : ils ne l’ont fait que trop souvent, ils s’en sont toujours mal trouvés. Mais, en admettant que des fautes et des maladresses aient été commises, où sont les délits, où sont les crimes dont on cherchait la trace ? La forme de notre gouvernement n’a jamais été mise en cause. Il est même surprenant, à dire le vrai, que, dans une correspondance aussi copieuse que celle de Mgr  Montagnini, et où on voit passer tant de personnages divers, l’oreille ne perçoive pas une seule fois un son anticonstitutionnel. Les catholiques ont usé de leur droit sans en sortir. Ils se sont groupés ; ils ont préparé des plans d’action commune ; ils ont pris quelquefois, — pas toujours, — le mot d’ordre auprès d’un homme qui était à leurs yeux le représentant du Saint-Siège. Mais en tout cela il s’agissait de religion et non pas de politique. C’est ce qui ressort de la publication des papiers Montagnini plus clairement que nous ne l’avions espéré, — et surtout que le gouvernement ne l’avait cru.

Parmi les catholiques qui ont été en rapport avec Mgr  Montagnini, les uns, comme M. Piou, se sont plus particulièrement occupés des élections ; les autres, comme M. Denys Cochin sont restés complètement étrangers à l’action électorale, et ne se sont quelquefois entremis que dans un intérêt religieux et patriotique. Si on peut reprocher aux premiers de s’être engagés dans des aventures, — ce qu’ils ont fait à leurs risques et périls, — qu’a-t-on à dire aux autres ? Ils se sont conformés aux exhortations que leur avait adressées du haut de la tribune M. le ministre des Cultes lui-même ; et assurément ils n’avaient pas besoin d’invites ni de conseils pour s’engager dans cette voie, il leur suffisait de suivre leur conscience. Qui sait pourtant si, dans une certaine mesure, les encouragemens publics de M. le ministre des Cultes n’ont pas encore activé leur zèle ? Le gouvernement ne voulait pas négocier directement avec le Saint-Siège ; il s’était même mis, au moins pour un temps, dans l’impossibilité de le faire. Mais, suivant l’expression de M. Briand, il usait du maximum possible de négociations indirectes et il sollicitait pour cela le concours des catholiques les plus notables. La tâche qu’il ne pouvait pas remplir lui-même, il leur demandait de la remplir à sa place : il comptait sur eux pour faire entendre la vérité à Rome. Ici encore, on est bien obligé, comme toujours, de reconnaître que la situation des catholiques n’était pas moins fausse que celle du gouvernement de la République, ou que celle du Saint-Siège. Personne n’avait qualité pour faire ce que pourtant chacun faisait. Les démarches, quelles qu’elles fussent, n’engageaient que leur auteur. On sentait partout l’absence d’un organe