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des monumens, se trouve le long de la rivière desséchée. Ils datent certainement de la période romaine.

Si nous suivons le cours de l’Ouady, en le remontant à partir de l’Ouest, nous trouvons, sur la rive gauche, à peu de distance de la berge, une vaste construction : le Kasr Fir’aoun ou Château de Pharaon. C’est un temple, vraisemblablement. Quatre colonnes soutenaient l’entrée du pronaos ; les murs, encore debout, sont intacts, ou à peu près, jusqu’à la corniche que décorent des triglyphes et des boucliers. La toiture effondrée remplit l’intérieur des trois salles d’une quantité de débris ; ces salles, très hautes, étaient ornées avec du stuc, tombé aujourd’hui ; mais les fiches de bois qui servaient à le retenir sur la pierre sont encore parfaitement visibles. Ce monument est le mieux conservé de la Pétra bâtie ; il est d’une époque tardive, à en juger par le style et la facture. En contre-bas, le long de la rivière, il y avait la voie triomphale avec son arc, ses colonnades, des massifs de maçonnerie qui paraissent avoir été des socles de statues ; peut-être voit-on encore les bases de la tribune des orateurs. En cherchant bien, on peut reconstituer la place publique, de dimensions assez médiocres.

Les Romains, qui voyaient si grand, ne paraissent pas avoir jamais goûté un large forum où, sous l’émotion des harangues, les mouvemens populaires pouvaient subitement se déchaîner. Il devait y avoir une raison politique bien puissante, car celui de Pétra ne le cède en rien, comme exiguïté, à ceux de Timgad, de Pompéi et même de Rome.

Pour aller d’une rive de l’Ouady à l’autre, soit sur la rivière principale, soit sur ses affluens, il y avait des ponts soigneusement construits, dont les culées sont bien conservées. Ces ravins qui sont généralement secs étaient endigués, car, si dans ces pays, les pluies sont rares, quand elles se mettent à tomber, elles sont d’une extrême violence. Aucune terre végétale n’est là pour en retenir et régulariser l’écoulement. En quelques minutes, l’eau affluant de tous les côtés se précipite furieusement vers les lits naturels et les transforme en torrens qui dévastent tout devant eux. Aussi, pour cette ville située dans une cuvette, toutes les précautions avaient été bien prises afin de lutter contre une subite inondation.

A part ces monumens que je viens de signaler, il subsiste toujours, dans les mêmes parages, des traces de fondations de