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GABRIELE D’ANNUNZIO
ROMANCIER

Victor Hugo mourant disait : « Il est temps de désencombrer mon siècle. »

M. Gabriele d’Annunzio a voulu occuper de soi le temps où il vit. Il a pris la peine de guider, en ce qui le concerne, toute incertitude de la critique :


Mes romans, écrit-il (1906) ont été jusqu’ici la représentation de mon « moi » : ce sont presque des pages autobiographiques dans lesquelles j’ai infusé la torture intime de mon esprit, les oscillations douloureuses de mon âme, le terrible tourment de mon intelligence et de mon cœur stupéfait devant les mystères, les phénomènes les plus troubles et les plus ardens du plaisir, de l’amour, de la volupté et de la mort...


Après une profession de foi si nette, le lecteur des romans de M. d’Annunzio se sent suffisamment autorisé à lever les masques légers de ses héros André Sperelli, Tullio Hermil, Georges Aurispa, Cantelma, Effrena, — pour dégager de la diversité de leurs expressions le visage de M. Gabriele d’Annunzio lui-même. Ce portrait est intéressant à tracer. Aussi bien cet écrivain apparaît-il, aux confins du XIXe et du XXe siècle, comme une des personnalités les plus caractéristiques dans lesquelles l’Italie contemporaine exprime, sur le fond de son tempérament atavique, les reliefs momentanés de sa sensibilité et de son intellectualité.