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Et j’exalte avec joie en cet hymne où je mêle
Dans un triomphe égal votre gloire jumelle,
La terre, inépuisable en sa fécondité,
Et ton front où le Rêve a déjà médité.

LA LEÇON


Si rude que d’abord l’enseignement puisse être,
L’adolescent reçoit la leçon de l’ancêtre.
Celui-ci, de la voix ou du geste guidant,
Fin laboureur et tendre aïeul, l’élève ardent,
Contient sa fougue et, fier d’un des fils de sa race.
L’oblige à creuser droit l’obscur sillon qu’il trace.
Cependant qu’attentif et docile, l’enfant
Glisse en l’humide et grasse argile qui se fend,
Les bœufs au poil vermeil, qu’un joug noueux entrave,
Comprennent que cette heure est décisive et grave,
Car l’humble couple apporte au labeur accepté
Plus de vaillance encore et de solennité,
Et tout en lui, jusqu’à sa lenteur calme et saine,
Ajoute à la beauté rustique de la scène.
Le soc même, le soc moins lourd et plus humain,
Se laisse diriger par la novice main ;
Et déjà c’est un pacte ignoré qui se scelle
Entre l’enfant promis à la charrue et celle
Qui prodigue les blés et qui mûrit le vin.
Or, sachant qu’ici-bas aucun effort n’est vain,
La Nature, qu’on croit impassible, est en fête,
Et l’émoi radieux dont son ivresse est faite,
Comme aux temps primitifs des nomades pasteurs,
A l’infini s’exhale en souffles créateurs.

ÉMIGRANS AÉRIENS


L’antique laboureur, blanc comme un patriarche,
Sur le champ qu’une averse hier a fait bourbeux,
A l’œuvre depuis l’aube, infatigable, marche.
Et gravement parle à ses bœufs.