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Ah ! puisqu’un saint travail te réclame à toute heure,
Modeste ainsi qu’il sied à qui répand un peu
De rêve devant l’homme et d’amour devant Dieu,
Parfume de bonté ta vie intérieure.

Et demeure, ô fileuse obscure, dont jouis
Tourner activement l’infatigable roue.
Celle que le poète à la fois charme et loue
Au rythme harmonieux de ses vers réjouis.

LES CORBEILLES


Dès l’aurore à la tâche, humble fille, et tressant
L’osier flexible avec un geste caressant,
Tu prépares la grâce intime des corbeilles
Pour les fruits savoureux et les grappes vermeilles.
La prune qui se change en miel pur sous la dent,
La pêche veloutée et l’abricot fondant,
L’oblongue poire d’or et la pomme arrondie.
Le raisin qui, plus tard vin de pourpre, incendie
La coupe où l’on oublie, en buvant, ses douleurs ;
Tout ce que promettait l’arbre en ses tendres fleurs.
Tout ce qui mûrissait en d’obscures argiles.
Dans les frêles réseaux que font tes doigts agiles.
Viendra s’amonceler, charmant l’espoir humain ;
Et les losanges clairs qu’entre-croise ta main.
Au rythme de ta voix qui vaguement chantonne,
Recevront les présens juteux du tiède Automne.
Douce vierge, à travers les mailles d’osier fin.
Pour étancher la soif, pour apaiser la faim.
Je vois, sous leurs duvets de soie et leurs peaux d’ambre,
Les pacifiques dons qu’illumine Septembre.
Récoltés en plein vent, cueillis aux espaliers,
Mais suspendus encore aux rameaux familiers,
Ils enfleront bientôt les corbeilles remplies.
Or, tandis qu’à ton gré, fille allègre, tu plies
Les brins souples, je songe aux labeurs non pareils
De tant de jours de pluie et de tant de soleils,