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aux mille complications du régime de la propriété foncière, l’Européen fixé en Babylonie ne laisserait pas que d’avoir peine à s’acclimater. Presque partout, la fièvre ou des chaleurs excessives, ce qui semble indiquer que le climat, à la longue, a bien pu se modifier. A cet état de choses, les grands déboisemens ne sont sans doute pas étrangers. Or, n’est-il pas évident que s’il faut, pour y porter remède, des sommes énormes, il faudra peut-être aussi des siècles d’efforts persévérans ?

Que reste-t-il alors, pour la ligne de Bagdad, des prévisions fondées sur la renaissance économique du pays ? L’adoption du tracé du Sud ajourne les résultats à des échéances lointaines, que la prudence interdit de trop escompter. Pour organiser financièrement l’entreprise, il faudra prévoir une recette kilométrique pendant longtemps médiocre, très inférieure aux 12 000 francs de Haïdar-Pacha-Angora, aux 7 000 francs d’Eski-Chéhir-Konia, et même aux 5 000 francs de Cassaba-Prolongement[1]. La première section du Bagdad rend environ 1 600 francs, et sans doute elle se termine en cul-de-sac et n’a pas encore son débouché sur la mer. Mais la distance est longue du golfe d’Alexandrette au golfe Persique, et les recettes viendront lentement. Bien des années passeront avant que l’affaire donne les bénéfices qu’envisagent ses promoteurs. Il sera donc sage de compter sur une faible moyenne, et de faire gager solidement la garantie kilométrique, dernier refuge des capitaux en mal d’intérêt.

Cette question de la garantie d’intérêt menace d’être la pierre d’achoppement de l’affaire de Bagdad. Les capitaux qui s’engagent dans des entreprises de chemins de fer en Turquie ne se contentent pas d’une promesse de rémunération stipulée par le gouvernement : ils exigent des sûretés réelles. Or, les finances de l’Empire, singulièrement obérées, ne permettent pas de fournir sans cesse de nouveaux gages.

Pour la première section Konia-Boulgonrlou, la Compagnie concessionnaire a obtenu des garanties suffisantes : d’une part, l’annuité de 4 500 francs pour dépenses d’exploitation est couverte par l’excédent des revenus affectés à la garantie kilométrique

  1. Alexis Rey, Statistique des principaux résultats de l’exploitation des chemins de fer de l’Empire ottoman pour l’exercice 1905.