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éminente par sa piété que par sa naissance, d’écrire sur les miracles accomplis par nos saints martyrs un petit ouvrage que l’on pût lire dans les temps à venir ; j "ai obéi, non selon mon vouloir, mais selon mon pouvoir.


Sur quoi, il rapporte cette histoire véridique. Après avoir fondé ses deux monastères, Girard envoya à Rome un abbé et un laïque demander des reliques au pape pour sanctifier ces maisons. Le pape fit bon accueil à ses messagers et leur donna les corps de saint Pontien et de saint Eusèbe. Ils revinrent alors par les Alpes Cottiennes. rapportant les saints, qui firent des miracles en route et, par exemple, les empêchèrent de se noyer au passage d’une rivière. Venus à Lyon, ils y entreposèrent les deux chasses.

Tandis qu’ils voyageaient ainsi (sub idem fere tempore), le marquis Girard n’était pas resté inactif. Une bonne nouvelle s’était répandue jusqu’à lui : dans le Vivarais, on venait de retrouver le corps, perdu depuis six siècles, de saint Andéol, qui s’était révélé par des miracles. « Les illustres époux, G (irardus] et B (erta], brûlent d’obtenir pour leurs monastères une part de ses reliques. » Ils se mettent tous deux en route vers Bourg-Saint-Andéol en Vivarais, où les évêques de la région les accueillent et leur font présent d’une partie du corps du saint, et, par surcroît, de parcelles du corps de saint Ostien. Girard et Berte repartent, convoyant ces trésors jusqu’à Vienne, puis jusqu’à Lyon. Là ils retrouvent les corps, qui les attendaient, de saint Pontien et de saint Eusèbe. Voilà donc réunis à Lyon saint Pontien, saint Eusèbe, saint Andéol et saint Ostien. Autour de leurs châsses, des aveugles recouvrent la vue, des paralytiques se redressent, etc.. Le cortège des quatre saints, toujours conduit par Girard et Berte, s’achemine en grand apparat vers la Bourgogne, en passant par Mellecy, Sampigny (Saône-et-Loire), Saulieu (Côte-d’Or), Avallon (Yonne) ; à chacune de ces étapes, à D’autres encore, se produisent des miracles insignes. Enfin, arrivés à Vézelay, Girard et Berte y déposent les reliques, quitte à en donner plus tard une partie à Pothières[1].

Il n’y a pas à douter de l’authenticité de cette relation, et Girard et Berte l’ont assurément provoquée et connue. En quoi nous intéresse-t-elle ? En ce qu’elle nous montre Girard et Berte occupés, si je puis dire, à se créer à eux-mêmes leur légende.

  1. La fin de la relation est malheureusement perdue.