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plus grandes chances d’agir en honnête homme ; le divorce par la volonté d’un seul serait une monstruosité. » Telle est aujourd’hui, en la matière, l’opinion du théâtre.

Par malheur, les plus beaux discours n’ont jamais ramené personne « Ils ont parfois changé mon opinion, disait un fameux parlementaire ils n’ont jamais changé mon vote. » Germaine est si peu convertie, qu’elle a comploté son évasion. Elle doit, cette nuit même, à l’issue d’un bal, se sauver et rejoindre Bernier qui l’attend. Mais le mari a été averti. Il attrape Germaine au passage, et, cette fois, use du dernier argument qu’il tenait en réserve. C’est, à ne vous le point celer, le moyen du muletier. Il se trouve que c’est le bon. Germaine n’est pas de ces femmes qu’on prend par le raisonnement : ç’avait été l’erreur de son mari de ne s’en être pas encore aperçu. Elle connaît enfin le bonheur : à quoi bon risquer de perdre au change ?

Il faut maintenant que Bernier reparaisse, tout au moins pour recevoir signification de son congé. Il faut que les deux hommes se rencontrent. Toute pièce sur le divorce doit mettre en présence le premier mari et l’autre. C’est la scène à faire. Et elle est difficile à faire ; la situation étant de celles qu’on a toutes les peines du monde à tenir dans la note grave. Souvenez-vous du dernier acte du Dédale ! M. Hervieu, dont l’art n’esquive jamais une difficulté, avait mis aux prises les deux maris ; et leur femme se trouvait extraordinairement gênée entre ces deux hommes, dont elle avait remplacé le premier par le second et trompé le second avec le premier. Finalement l’auteur, ne sachant que faire de ces mâles devenus des fauves, s’en débarrassait comme il pouvait, en les jetant tous deux dans un torrent. M. Hermant a usé d’un procédé plus radical encore. C’est l’acte lui-même qu’il a supprimé. Nous avons appris en effet, après les premières représentations des Jacobines, que le quatrième acte avait disparu, et que la pièce y avait plutôt gagné. Voilà qui est pour le mieux. Beaumarchais ne se fût pas scandalisé pour si peu, lui qui, devant l’accueil un peu froid fait aux cinq actes du Barbier, s’était aussitôt « mis en quatre » et avait supprimé « la cinquième roue de son carrosse. » Mais qu’en eût dit Dumas fils ? Il aimait à répéter qu’un dénouement est un total mathématique, et qu’on ne doit pas commencer une pièce avant d’avoir trouvé le mouvement et le mot de la fin. De toute évidence, M. Hermant ne partage pas l’avis de Dumas fils sur les dénouemens.

Les ouvrages de M. Hermant en rappellent souvent d’autres, et on lui reproche volontiers que son talent soit surtout un talent d’assimilation. Cette fois, le reproche ne serait pas fondé. Car en écoutant