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paquebots étrangers : l’Oceanic, l’Adriatic, le Baltic, le Cedric de la While Star ; l’America et le Kaiserin Augusta Victoria de la Compagnie Hambourgeoise ; le Caronia et le Carmania, le Mauretania et le Lusitania, — ces deux derniers en construction, — de la Compagnie Cunard, ne pourraient pas y entrer. Mais, bien entendu, tous ces navires peuvent facilement faire escale en rade de Cherbourg. De sorte que les étrangers, non seulement, ne paient que des sommes relativement faibles pour venir, sur nos côtes, prendre et débarquer des passagers transatlantiques, mais que, en outre, ils peuvent envoyer, pour ces mêmes opérations, des navires que, nous Français, nous ne pouvons pas exploiter dans nos propres ports. Ils sont aidés enfin par la situation géographique de la France, qui vient encore nous causer un grave préjudice, en offrant, aux paquebots concurrens, des escales qu’ils desservent sans déroutement et sans perte de temps.

On se plaint de l’état de stagnation de notre marine marchande et on recherche les moyens de réagir. On a créé des régimes de primes à la construction, de primes à la navigation, de compensations d’armement : nous devons remercier le Parlement de sa sollicitude ; mais, jusqu’à présent, ces différens remèdes ne semblent pas avoir apporté de sérieux soulagemens au mal dont nous souffrons. N’est-il pas évident qu’un des moyens les plus efficaces de donner de l’impulsion à notre marine serait de lui offrir des ports bien aménagés, avec des profondeurs d’eau suffisantes, des formes de radoub, un outillage moderne, des quais accessibles, etc. ?

L’histoire du port du Havre est, à ce sujet, des plus instructives, et elle mérite d’être rappelée.

C’est vers l’année 1877 que l’opinion publique sembla s’émouvoir, au sujet de l’insuffisance de ce port, principalement pour la grande navigation. À cette époque, différens projets furent élaborés pour la construction de vastes bassins. La question s’étant resserrée peu à peu, on se décida à mettre à l’enquête un projet officiel qui fut examiné en 1882, concurremment du reste avec d’autres dus à l’initiative privée. Ce projet gouvernemental comportait : une nouvelle entrée, un nouvel avant-port, et la création de plusieurs nouveaux bassins à flot, avec des formes de radoub de différentes dimensions. Il aurait certainement donné satisfaction aux besoins de la grande navigation, et fut voté par la Chambre des députés. Son exécution devait