Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/324

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le 9 juillet 1472, une ambassade française fort solennelle, dirigée par Gérard de Crussol, évêque de Valence, vint apporter au pied du trône apostolique les desiderata du Roi. Les débats se poursuivirent jusqu’au 15 août. Dès le 13, le Pape en avait consigné les résultats dans une bulle que l’évêque de Valence apporta au Roi. Le 31 octobre, Louis XI faisait passer ce concordat dans l’ordonnance d’Amboise dont les partisans de la politique d’accord doivent garder la mémoire : pour la première fois, un traité passé entre le Pape et l’Etat français apparut dans le code de nos lois. A lire ce traité, on s’explique d’ailleurs qu’il ait eu une existence assez éphémère. Louis XI n’obtenait pas autant qu’il aurait voulu ; mais il était à cette heure-là en proie à mille affaires scabreuses, et il était important que Rome se tînt tranquille quelque temps. Le principe adopté était celui de l’alternative. Le Saint-Siège et les Ordinaires devaient conférer, chacune des deux parties pendant six mois, les bénéfices vacans. Tous les six mois, le Pape devait pourvoir six sièges non point vacans, mais à vaquer, « ceux que désigneront le Roi, la Reine, le Dauphin et les Cours du Parlement. » D’ailleurs, par l’article 10 de l’ordonnance, Louis XI déclarait, — pour désarmer les gallicans alarmés, — que, par un bref sub annulo piscatoris, le Pape lui avait octroyé « qu’il ne pourvoirait aucunes personnes de dignités consistoriales de nostre dict royaume, Dauphiné et autres nos terres et seigneuries, sans avoir sur ce préalablement nos lectres, pour y pourveoir des personnes à nous seurres, féales et agréables. » C’était la clef… peut-être.

Cet article rassurant ne rassura personne ni au Palais de justice ni à la Sorbonne : on s’y insurgea en termes vifs contre un contrat où tout avantage réel était, disait-on, refusé à l’Eglise de France. Louis XI ne pouvait proclamer que, s’il avait cédé, c’était en vue d’événemens dont le secret devait être gardé. Il se laissa remontrer par le Parlement, lui permit, avec une patience qui lui était peu ordinaire, de ne pas enregistrer les bulles « attentatoires à la couronne, » et n’appliqua le Concordat qu’en pourvoyant directement aux sièges vacans. Il avait fait admettre le principe du Concordat, mais une fois de plus s’était aperçu que Rome n’était pas encore mûre. Il n’avait pas voulu opposer une fin de non-recevoir, ni décourager pour l’avenir la Cour de