Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 38.djvu/319

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« libertés gallicanes, » qui mettaient les ecclésiastiques sous la dure loi des laïques, et quelques mois après, le 18 janvier 1460, dans la bulle Exsecrabilis, il parla en termes amers de ceux qui déchirent la robe du Christ, « introduisent dans l’Eglise, écrivait-il ailleurs, une hydre à têtes multiples. »

Le Parlement répondit à la bulle Exsecrabilis : le 10 novembre 1460, le procureur général Dauvet affirma, — au nom du Roi, disait-il, — que le Pape cherchait un prétexte pour rompre « et qu’il l’engageait à réfléchir mûrement avant d’engager la lutte contre une telle multitude de chrétiens. » On l’avertissait d’ailleurs sans aucune aménité de renoncer à s’ingérer en France.

C’était pousser un pape de ce génie et de cette vigueur à rompre effectivement. L’Europe, hostile à la France, commençait à voir dans ce conflit latent, déjà vieux de vingt-trois ans, une occasion excellente de desservir la « fille aînée, » toujours haïe par la Chrétienté. François Sforza, duc de Milan, insinuait par exemple à Pie II que la France allait occuper Avignon. Le bon apôtre s’indignait des « desseins hérétiques » du Roi Très Chrétien ; subsidiairement, il engageait Pie II à fermer l’Italie à l’influence française. Si ces insidieuses paroles n’arrachaient pas au Pape une formelle condamnation, elles l’incitèrent à écrire une lettre fort acrimonieuse à Charles : « Tu te dis fils très obéissant de la sainte Eglise romaine. Pardon ! Pourquoi gardes-tu, en ce cas, la Pragmatique ? »

La lettre fut écrite le 25 mars 1461 et resta sans réponse : le 22 juillet suivant, Charles VII rendait l’âme.


II

Le 27 novembre 1461, sans que rien l’eût fait prévoir, le nouveau roi Louis XI abolissait purement et simplement la Pragmatique Sanction. Par des lettres de Tours il s’exprimait sur la constitution de 1438 en des termes propres à satisfaire le plus exigeant des papes : « Nous reconnaissons que la Pragmatique Sanction est un instrument forgé contre vous et contre le Saint-Siège, car elle a été rédigée à l’occasion d’une rébellion, à une époque de schisme : sa mise en vigueur a été un acte de révolte, de séparation d’avec le Saint-Siège ; c’est de vous que découlent les lois sacrées, c’est en vous qu’elles ont leur