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pendant une ascension au Mont-Blanc. C’était là le but principal des premières expéditions de M. Janssen. Il a pu, en effet, avec les spectroscopes qu’il avait emportés, constater d’une manière indubitable la diminution de l’intensité du groupe B avec l’élévation de la station ; mais la hauteur du Mont-Blanc ne suffit pas pour éteindre toutes les raies de l’oxygène. M. le comte de La Baume-Pluvinel a confirmé ce résultat en photographiant le groupe B du spectre solaire à Chamonix et au sommet du Mont-Blanc, au mois de septembre 1898. Mais la persistance des raies en question s’explique aisément, puisque, d’après les expériences de laboratoire de M. Janssen, une colonne d’oxygène de 120 mètres de longueur, à la pression normale, suffit pour produire une absorption qui donne naissance aux raies B, et que, d’autre part, la couche atmosphérique qui pèse sur le Mont-Blanc équivaut encore à une colonne d’oxygène de 900 mètres, soit sept fois la longueur indispensable pour obtenir les raies. Il faudrait évidemment, pour voir disparaître complètement ces raies si persistantes, s’élever beaucoup plus haut, à des altitudes de 15 ou 20 kilomètres. Des ballons-sondes, munis de spectrographes automatiques, fourniront peut-être un jour la solution du problème. Il ne faut pas, d’ailleurs, oublier que l’étude des raies de l’oxygène est rendue assez difficile par la présence des raies de la vapeur d’eau, qui s’y mêlent toujours. Enfin, la visibilité persistante des raies peut s’expliquer en partie par l’intensité plus grande de la lumière, soumise à une absorption moins forte.

Malgré ces difficultés qui subsistent toujours, et qui appellent de nouvelles recherches, la concordance des preuves partielles que nous possédons déjà permet d’affirmer que les raies du spectre solaire qui caractérisent l’oxygène proviennent de l’atmosphère terrestre, et que l’oxygène, tel que nous le connaissons, n’existe pas dans le soleil. Cela n’empêche nullement d’admettre que ce corps s’y trouve sous une autre forme, plus simple, peut-être à l’état de dissociation.


II

Pour mener à bien de semblables recherches, il ne faut pas compter sur des ascensions, même répétées ; il est indispensable de disposer d’un observatoire permanent, pourvu d’un certain