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voyelles et de consonnes, a été dédoublé au profit du j et du v, spécialement appelés au rôle de consonnes.

On sait encore qu’en grec, deux des voyelles de l’alphabet latin sont représentées chacune par deux signes, suivant que le son en est bref ou long. En français, même, on a désigné les sons multiples des voyelles par les trois accents, aigu, grave, circonflexe ; sans parler ni d’un quatrième signe, le tréma, ni de la valeur propre de l’e muet.

L’accouplement des voyelles, celui des consonnes et l’existence de la lettre double : œ (œil), produisent également des sons complexes, analogues à ceux des lettres grecques, ζψ, etc. Ces sons sont mal représentés dans notre alphabet.

On conçoit dès lors comment le grammairien Doumergue, au cours du dernier siècle, avait cru devoir proposer de porter l’alphabet à quarante signes : dix-neuf voyelles et vingt et une consonnes.

2o Substitutions de lettres. — J’ai déjà parlé de la substitution de la lettre f au groupement ph. Les lettres x et s à la fin d’un mot, où elles ne se prononcent pas, et notamment au pluriel, pourraient être remplacées d’une façon uniforme par la lettre s : les feus au lieu de feux, les dieus au lieu de dieux, dis au lieu de dix, chous au lieu de choux, eureus au lieu de heureux, etc.

Mais la prononciation oblige à conserver l’x dans borax, codex, Aix, exil, auxiliaire, etc., à cause du son propre de la lettre ; à moins de remplacer l’x par les deux lettres cs : ecsil pour exil, aucsiliaire, etc. Cela a été proposé, en effet, par quelques réformateurs, par analogie avec tocsin, opposé à toxine et à vaccin. Le s remplacerait aussi le ç avec cédille : fason pour façon ; fransais pour français ; Fransois pour François.

Le s remplacerait encore le t et le c, suivis de la lettre l avec prononciation sifflante : siel pour ciel, et par extension : siense pour science, nasion pour nation, prononsiasion pour prononciation.

On éviterait ainsi l’identité d’écriture avec prononciation contradictoire : comme dans partition devenant partision, et pétition devenant pétision.

Ici se placent, par voie d’extension, certains changemens qui touchent aux modes de formation grammaticale, tels que la diversité plurielle des mots en al : cheval faisant chevaux, tandis que naval fait navals ; fatal, fatals.