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a cru jusqu’à ces derniers jours qu’il en serait encore de même cette fois. Ses chefs, peut-être par tactique électorale, annonçaient leur victoire comme certaine ; ils en donnaient le chiffre ; ils le brandissaient avec une confiance affectée. Les ballottages leur seront peut-être plus favorables ; mais pour le moment ils ont perdu une vingtaine de sièges sur les 79 qu’ils occupaient dans la dernière assemblée au moment où elle a été dissoute. En 1903, ils avaient fait passer 30 des leurs au premier tour de scrutin : ils n’en ont fait passer que 30 le 25 janvier. C’est une vraie débâcle, et elle est d’autant plus pénible pour les socialistes qu’ils sont, en somme, le seul parti auquel les élections aient été fatales. Bernstein est battu, Wollmar est en ballottage, tandis que tous les champions du parti catholique, MM. Rœren, Erzberger, Ballestrem, ont été brillamment réélus. Le centre était et restera le groupe le plus important de l’assemblée : il sera difficile de se passer de lui.

Les socialistes ne cherchent pas à dissimuler leur échec, mais à l’expliquer, et c’est à quoi s’appliquent aussi, en tâtonnant quelque peu, leurs camarades dans les autres pays du monde. Ils reconnaissent que certaines circonstances accidentelles avaient, aux élections dernières, enflé leur contingent d’élémens peu solides, en Saxe par exemple où ils avaient eu un succès tout à fait inespéré, à la suite de certains scandales dont l’impression était alors très vive et s’est depuis atténuée. Ils expriment la crainte que leur entente avec les catholiques, due elle aussi à des circonstances provisoires, ne les ait compromis aux yeux de quelques-unes de leurs amis : ils n’osent pourtant pas le dire trop haut parce qu’ils ont plus que jamais besoin du centre pour les scrutins de ballottage. La vérité est que le parti socialiste a été victime des espérances qu’il avait fait naître et des déceptions qui en ont été la suite. En Allemagne comme ailleurs, il s’était offert pour faire des miracles et il n’en a fait aucun. Son influence parlementaire a été nulle. Il n’était pas assez nombreux pour l’imposer, et il n’a jamais pu former de majorité qu’avec les catholiques, lorsque ceux-ci se sont séparés du gouvernement après l’avoir longtemps soutenu. On s’est dégoûté peu à peu d’un parti qui promettait tout et ne pouvait rien tenir : c’est la cause principale de son infortune électorale. Mais il y en a une autre, qui est reconnue par tous les journaux allemands, à savoir le nombre plus considérable des électeurs qui ont pris part au scrutin. L’ardeur de la bataille, accrue par celle que déployait le gouvernement, a fini par gagner les abstentionnistes, les indifférens d’autrefois : or les abstentionnistes