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à dégager et à remettre en honneur toutes nos traditions vitales, traditions religieuses, traditions d’art et de littérature, et aussi tradition libérale, celle qui, depuis cent dix ans, a mis en nous une aspiration plus précise vers un idéal de liberté et de justice. M. René Doumic conseille aux femmes d’enseigner à leurs fils à vivre non pas pour eux-mêmes et pour leur propre intérêt, mais pour le bien de leur pays. M. Maurice Barrès pense que c’est aux femmes surtout à favoriser dans l’âme de leurs enfans la poussée des ancêtres, à éveiller chez elle et à nourrir les émotions héréditaires, à la meubler d’images nationales et familiales. M. Anatole Leroy-Beaulieu appelle la femme à la défense de la liberté d’enseignement qu’elles doivent aimer et défendre comme mères de famille, pour sauvegarder leur droit, et, ce qui leur tient encore plus au cœur, le droit de leurs enfans. Ce ne fut pas seulement à Paris, dans la salle de la Société d’Horticulture que les conférenciers donnèrent cet enseignement. Ils allèrent en province, à Toulouse, à Reims, à Nantes, à Besançon, à Nancy, à Lyon, à Bordeaux, à Montpellier, à Marseille, à Nice. En cinq années, dans tout le pays, il fut donné cinq cents conférences. La conférence est comme une semence jetée. Si elle a éveillé la curiosité, l’intérêt, la semence germera. Des femmes se rassembleront, échangeront des idées, discuteront, et se décideront à agir.

Mais, pour mériter complètement son nom, l’Action sociale de la Femme ne devait pas se contenter de faire parler et d’écouter : elle devait agir elle-même. Et elle agit.

À Paris, tout d’abord, l’action sociale a ce que sa fondatrice appelle des réunions d’études. J’ai eu moi-même l’occasion de m’en entretenir naguère avec Mme Chenu à la permanence de l’œuvre, rue du Rocher. Ces réunions d’études, auxquelles prennent part des personnes compétentes, poursuivent des enquêtes. On y étudiait alors la question de l’apprentissage dans les ateliers de couture, et l’on consultait patrons et patronnes, délégués de syndicats et membres de la Chambre syndicale de la couture parisienne. Le livre y était aussi un objet de recherches très persévérantes ; l’Action voulait à la fois augmenter l’influence de la bonne presse et en faire exercer par la femme du monde une toute nouvelle sur le développement de la saine littérature. On consultait des éditeurs, des directeurs de journaux, des écrivains. Une enquête sur les destinées des arts religieux motivait une