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élève, à Budapest, un fils adultérin du roi Milan, dernier rejeton connu de la tige des Obrenovitch,

Ainsi tous les ressorts de la vie politique, tous les organes de la vie nationale serbe semblaient destinés à rester toujours sous la dépendance étroite du gouvernement austro-hongrois. Les troupes serbes ne pouvaient songer à une lutte contre l’armée impériale qui, de tous côtés, enserre le royaume dans un immense réseau militaire : en Bosnie, en Herzégovine, dans le sandjak de Novi-Bazar, les Autrichiens ont des troupes ; dans le sandjak d’Uskub, ce sont les officiers autrichiens qui ont été chargés de la réorganisation de la gendarmerie turque ; un cercle de fer s’étend autour de la Serbie, sans qu’elle puisse compter sur l’appui d’aucun allié, surtout depuis que l’Extrême-Orient et les difficultés intérieures ont distrait l’attention de la Russie des événemens balkaniques. Il semblait donc que le petit royaume dût se résigner à subir la loi de son puissant voisin. L’expérience faite en 1896 avait paru concluante : des difficultés politiques ayant amené une rupture économique, le malaise fut bientôt si général en Serbie qu’il parut nécessaire de céder et d’obtenir la réouverture de la frontière au prix d’une amende honorable. Ainsi la question paraissait jugée et la Serbie semblait, par sa situation géographique et la nature de sa vie économique, condamnée à ne se développer que comme un satellite de l’Autriche et de la Hongrie et dans les limites seulement où il plairait à celles-ci de le lui permettre.


II

L’avènement du roi Pierre Ier malgré les graves difficultés inhérentes à son origine, a donné, au gouvernement et à la vie politique de la Serbie, une allure et un caractère nouveaux. La monarchie a cessé d’être personnelle pour devenir constitutionnelle. Le roi Milan et le roi Alexandre appelaient au ministère les hommes en qui ils avaient personnellement confiance, sans tenir compte de l’opinion publique ou de la majorité parlementaire. Le nouveau roi, lui, a cherché à s’appuyer réellement sur le pays et à gouverner en tenant compte de ses vœux. À la vérité, l’éducation politique d’un pays où la majorité de la population est illettrée ne saurait être encore très avancée, mais elle est en sensible progrès, et l’on est fondé à dire que la politique et les