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mettre la main sur lui, à moins qu’il ne soit trahi et livré par les tribus auprès desquelles il a cherché un refuge. La mehalla, quelque nombreuse qu’elle soit relativement aux forces dont dispose encore Raïsouli, a montré qu’elle manœuvrait et se battait médiocrement. Les troupes de police, lorsqu’elles seront encadrées et commandées par des officiers français et espagnols, présenteront certainement un autre caractère ; mais elles n’existent pour le moment qu’en projet : il se passera d’assez longs mois encore avant que la mehalla et nos escadres puissent se retirer. Ces dernières, en tout cas, devront rester dans un voisinage assez rapproché pour que leur influence continue de se faire sentir. Si elles n’avaient pas été en rade de Tanger, jamais le Maghzen n’aurait envoyé la mehalla, et jamais Raïsouli n’aurait été inquiété. L’effet devant cesser avec la cause qui l’a produit, on peut deviner ce qui arriverait dans le cas où nous disparaîtrions trop vite, et où la mehalla s’en irait elle aussi sans avoir été remplacée par des forces de police capables de remplir leur difficile et délicate mission.

Malgré les faiblesses d’exécution que nous avons signalées de la part de la mehalla, il serait injuste de ne pas reconnaître ce qu’il y a eu de sincère et de méritoire dans l’initiative du Maghzen. En somme, il a rempli sa tâche à lui seul et nous a dispensés de lui donner notre concours. Nous l’aurions fait s’il l’avait fallu, mais nous avons dit les motifs pour lesquels nous aimions mieux nous en abstenir. Nous avons tout intérêt, étant donné la politique que nous suivons au Maroc, à ce que le Sultan agisse avec ses propres forces et à ce qu’il atteigne à lui seul le but de son effort. Si son prestige y gagne, nous ne pourrons que nous en féliciter.


La mort du chah de Perse n’est pas en soi un événement de beaucoup d’importance. Mouzaffer Eddine était un homme d’une intelligence qui ne s’élevait pas au-dessus de l’ordinaire et d’un caractère un peu effacé. Prudent et circonspect dans sa politique extérieure, il a eu le tort, à l’intérieur, de ne pas surveiller assez ses finances, ou même de ne pas les surveiller du tout, et de faire, sans compter, des dépenses au-dessus de ses ressources.

Son règne n’a duré que dix ans ; mais il n’en fallait pas davantage pour que ses prodigalités produisissent leurs conséquences inévitables, un mécontentement toujours croissant parmi les contribuables odieusement pressurés, et dans les classes éclairées le sentiment de plus en (plus impérieux que des réformes politiques étaient