Page:Revue des Deux Mondes - 1907 - tome 37.djvu/234

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

destinées à la corriger ou à la compléter. On peut se résigner à la perte des biens ecclésiastiques : quelle que soit son étendue, c’est un malheur matériel. Mais qu’adviendra-t-il des églises ? Le gouvernement de la République ayant renoncé à négocier directement et ouvertement avec le Pape, les deux puissances emploient ce que M. Briand a appelé le « maximum de négociations indirectes : » c’est-à-dire que M. Briand fait des discours et que le Pape fait des encycliques. Mais encore faudrait-il se lire et tenir quelque compte de ce qu’on dit de part et d’autre. On ne le fait malheureusement ni à Paris, ni à Rome, ce qui donne à croire une fois de plus que cette manière de négocier est la pire de toutes.

Le Pape, dans sa dernière encyclique, s’est prononcé contre les associations cultuelles, « tant qu’il ne contestera pas, d’une façon certaine et légale, que la divine constitution de l’Église, les droits immuables du pontife romain et des évêques comme leur autorité sur les biens nécessaires à l’Église, particulièrement sur les édifices sacrés, seront irrévocablement, dans lesdites associations, en pleine sécurité. » Or, que deviennent les édifices sacrés avec la loi nouvelle ? Dans la loi de 1905, ils devaient, comme les biens ecclésiastiques, être remis aux associations cultuelles qui se seraient formées conformément aux règles générales du culte, c’est-à-dire à la hiérarchie ecclésiastique. Désormais, rien de pareil. Les églises sont remises à la disposition de leurs propriétaires qui, dans l’immense majorité des cas, sont les communes. Elles resteront, il est vrai, affectées au culte, jusqu’au moment où leur désaffectation aura été prononcée régulièrement : mais où est la garantie que les choses se passeront ainsi ? Avec la loi de 1905, la garantie était dans l’article 4 : cet article n’existant plus dans la loi nouvelle, elle n’est nulle part. Le maire attribuera l’église à un curé quelconque, celui qui lui conviendra, en vertu d’un acte administratif dont le caractère et les conditions restent indéterminées. Et quoi de plus fragile que cette attribution qui pourra être toujours révocable ? Il suffira que le curé cesse de plaire à la municipalité pour qu’on lui enlève son église. On fera tous les quatre ans les élections municipales sur cette question, qui sera, dans quelques-unes de nos communes rurales, une cause perpétuelle d’agitation. Le danger de schisme, que l’article 4 de la loi de 1905 avait à peu près conjuré, redeviendra très menaçant. Si le Pape, à tort ou à raison, n’a pas trouvé dans la loi de 1905 une sécurité suffisante pour l’usage des édifices du culte, on se demande comment il la trouverait dans la loi qui lui succède. M. Ribot a projeté sur toutes ces difficultés une lumière