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Madrid, par l’intermédiaire de notre ambassadeur d’abord et pour le fond des choses, par celui de M. l’amiral Touchard ensuite et pour les mesures d’exécution. Ce que nous allons faire à Tanger est, d’ailleurs, infiniment simple. Il s’agit de rétablir l’ordre et de préparer par là l’organisation de la police régulière sur le plan arrêté à Algésiras. Le désordre tient pour beaucoup à la présence et à l’action de Raisouli dont les exploits sont connus. Le mieux assurément serait que le Maghzen, piqué au jeu par l’intervention franco-espagnole, prit lui-même les mesures nécessaires pour la rendre inutile ; mais en a-t-il les moyens ? en a-t-il même la volonté et la vigueur ? Sur un autre point du Maroc, à savoir la frontière sud-oranaise, si sa bonne volonté est douteuse, son impuissance ne l’est pas. Là, nous faisons la police nous-mêmes, et nous seuls, en vertu de droits anciens que la conférence n’a eu qu’à reconnaître, ou plutôt à respecter. Les instructions données au gouverneur général de l’Algérie et au général Lyautey ont un caractère purement défensif. Si nous sommes attaqués, nous saurons nous défendre, et de façon à décourager l’adversaire de toute velléité de récidive. Mais, pas plus sur notre frontière qu’à Tanger même, nous n’avons aucune pensée de conquête territoriale. M. le ministre des Affaires étrangères a repris à la tribune le mot de pénétration pacifique pour définir notre politique : et cela même est une ; vue d’avenir plus encore qu’une intention immédiate. Sans doute, il est désirable que la civilisation pénètre peu à peu et pacifiquement au Maroc, et la France et l’Espagne ont en cela un rôle particulier à jouer ; mais leur action actuelle a une portée plus restreinte : il s’agit d’une première œuvre de police qui ne dépasse pas la banlieue de Tanger. Rien de moins, mais rien de plus. Notre mandat s’arrête là : nous n’en avons-pas demandé et nous n’en avons pas reçu d’autre à Algésiras.


L’attention a été attirée depuis quelques jours du côté de l’Amérique, et notamment de la Californie, la Commission scolaire de San Francisco ayant décidé que l’entrée des écoles publiques serait interdite aux Japonais. Bien qu’il soit délicat, l’incident n’aurait en lui-même qu’une faible importance, s’il n’était pas l’indice d’une situation générale fort tendue, les Japonais étant de leur nature très envahissans et les Américains de la côte du Pacifique n’étant rien moins que disposés à se laisser envahir. Ils ont déjà pris des mesures protectrices contre l’importation des Chinois ; mais on ne peut pas traiter les Japonais avec la même rigueur, ni avec la même