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REVUE LITTÉRAIRE

UN NOUVEL HISTORIEN DE ROME

S’attaquer au sujet même traité par Montesquieu dans un des chefs-d’œuvre de la littérature historique, reprendre sur nouveaux frais la tâche des Mommsen et des Boissier, n’est certes pas une entreprise médiocre ; c’est celle qu’a tentée avec une audace heureuse et qu’est en train de mener à bonne fin, avec autant d’opiniâtreté que d’ardeur et de verve, un jeune écrivain italien, aussi apprécié chez nous que dans son pays d’origine, M. Guglielmo Ferrero. De son ouvrage en cours de publication : Grandeur et Décadence de Rome[1], six volumes oui paru en italien, quatre ont été traduits en français. M. Ferrero qui, l’an dernier, appelé par la Société des conférences, avait fait l’épreuve du public parisien, vient d’être chargé de donner pendant un mois un cours au Collège de France. Ses leçons attirent un nombreux public. L’occasion est donc bonne pour rechercher ce qui a valu à son œuvre un si prompt retentissement et ce qu’elle apporte de nouveau dans la manière d’écrire l’histoire.

Entre les deux écoles dont l’une cantonne l’historien dans l’étude minutieuse des faits, sans lui permettre de les dépasser, et l’autre veut que tout l’intérêt réside dans l’interprétation de ces faits et dans leur enchaînement, M. Ferrero n’hésite pas. Lui qui fut naguère étudiant d’université en Allemagne, il prend nettement parti contre les méthodes d’érudition à l’allemande. Au cours d’un de ses volumes, rencontrant Salluste sur son passage, il le félicite d’avoir emprunté

  1. G. Ferrero, Grandeur et Décadence de Rome. — (I) La Conquête. — (II) Jules César. — (III) La fin d’une Aristocratie. — (IV) Antoine et Cléopâtre, 4 vol. in-12 ; Pion.