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MADAME DU DEFFAND
ET SA FAMILLE[1]

La nouvelle méthode historique, si précise, si documentée, la mise au jour, depuis une quarantaine d’années, de tant de papiers qui dormaient sous la poudre des vieilles armoires, ont éveillé dans les esprits, à l’égard des personnes célèbres, une curiosité plus intense, plus aiguë que par le passé. On ne se contente plus, comme le faisaient nos pères, de connaître leurs œuvres ou leurs actions publiques, avec quelques notions sommaires sur les faits marquans de leur vie et un vague aperçu de leur physionomie morale ; mais on se plaît à pénétrer dans leur intimité, à scruter les replis mystérieux de leurs âmes, à surprendre les secrets de leurs faiblesses, de leurs passions cachées, à rechercher aussi quels furent leur filiation, leur entourage, le train de leur existence journalière. Cette minutieuse investigation, tout indiscrète qu’elle puisse paraître, n’est peut-être pas aussi vaine qu’on l’a voulu prétendre. La destinée des hommes ne s’explique-t-elle pas fréquemment par leur origine, par leur éducation, par le milieu où s’est écoulée leur jeunesse ? Et n’y a-t-il pas chance de mieux comprendre et connaître les gens, quand on les voit agir et se mouvoir au naturel et sans apprêts, dans le déshabillé de leur vie familière, que si l’on se restreint à les considérer dans une attitude de commande, et sous les vêtemens de parade que leur ont imposés les nécessités de la scène ?

  1. Documens inédits tirés des Archives départementales de la Drôme, des Archives municipales de Roanne et des Archives nationales.