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main basse sur tous les Français résidant en ville et même sur l’équipage des navires stationnant dans le port. Avant le bombardement d’Alger par Duquesne, il devait y avoir 5 à 6 000 esclaves français (commencement de l’année 1684). D’après une lettre du capitaine Marcel, envoyé par Seignelay, ministre de la Marine, pour négocier la paix (16 novembre 1689), il y en avait alors 1 033. Depuis lors, à la suite des rédemptions opérées tour à tour par le Consulat de France et par les Trinitaires, le chiffre alla toujours en décroissant. Il était, en mai 1690, de 850, en 1691, de 440. Enfin, en 1693, après les rachats opérés par Denys Du Sault, il n’en restait plus que 8, et encore, ne les laissa-t-on en servitude que parce qu’ils étaient des « nouveaux convertis, » c’est-à-dire des Réformés français, convertis de force au catholicisme et qui étaient revenus au culte protestant[1].


II

Le misérable sort de ces esclaves préoccupa de bonne heure les chrétiens d’Europe et, en particulier, les nations riveraines de la Méditerranée, Espagne, Italie, France. La première eut, dès le XIIIe siècle, ses rescatadores les Al-fakher, hommes d’élite, sachant assez bien l’arabe et chargés d’aller racheter les captifs pris par les Sarrasins[2]. Saint François d’Assise se préoccupa de leur venir en aide, et son projet de voyage en Afrique avait été conçu dans ce dessein, mais il ne put le réaliser. Raymond Lull, ancien sénéchal de Jacques Ier, roi d’Aragon, fonda dans l’île de Majorque, qui venait d’être reprise aux Arabes (1269), un couvent de Franciscains, où l’on étudiait l’arabe. Il avait conçu le projet d’y fonder un séminaire pour l’éducation de missionnaires, qui iraient porter des consolations aux captifs des Barbaresques et s’efforceraient de convertir ces derniers. Les premiers prêtres qu’il envoya furent mis à mort ; lui-même, dix-sept ans après, joignant l’exemple au précepte, s’embarqua pour Tunis. Mais là, ayant voulu disputer avec les muftis sur la vocation prophétique de Mahomet, il fut jeté en prison et n’échappa à la mort que par la clémence de l’émir. Délivré, il reprit ses

  1. Lettre de Du Sault à Pontcharlrain, 22 mars et 2 mai 1693.
  2. Les Al-fakher, en arabe : « celui qui délivre, » étaient très populaires en Espagne. Voyez Rosseuw Saint-Hilaire, Histoire d’Espagne, t. III et IV. Organisation militaire.