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en effet une particularité singulière de ces êtres, de se tenir à la surface des eaux comme élémens de la gelée vivante dite « plankton, » où tant de bêtes, poissons et cétacés, trouvent leur alimentation principale. Après leur mort, ils abandonnent leur coquille vidée, à l’action de la pesanteur qui tend à la précipiter sur le fond sous-marin. Mais dans les grandes mers, le voyage vertical est si long qu’au cours de huit ou dix kilomètres à franchir, les infimes tests calcaires éprouvent, de la part du liquide océanique qu’ils traversent, une action chimique à laquelle ils ne peuvent pas toujours résister.

Et malgré ces circonstances, la craie de Passy est vraiment pétrie de ces incontestables témoignages de l’activité de la vie marine aux temps secondaires dans une localité dont les conditions générales ont si complètement changé depuis lors.

Si les travaux de nos chemins de fer urbains ne font qu’écorcher la formation crayeuse, nous savons par d’autres entreprises industrielles que celle-ci constitue dans notre sous-sol des couches superposées d’une épaisseur colossale : les puits artésiens de Grenelle, de Passy, et d’une série d’autres points dispersés dans la ville, sont restés, plus de cinq cents mètres durant, dans le système de celle même formation dont, par conséquent, les conditions d’origine se sont continuées fort longtemps.


VII

Nous pouvons maintenant résumer en quelques lignes l’histoire des vicissitudes nombreuses d’un sol qui a pris, depuis que l’homme s’y est établi, une signification si particulière et qui a été le berceau et le foyer de tant de grandes choses.

En reprenant la question à l’époque où s’est déposée la craie blanche, nous savons que toute la région était alors submergée sous les flots d’un océan très profond et dont les rivages étaient lointains. Il y avait déjà sur la terre et depuis bien longtemps, des continens et des îles, mais ils affectaient une distribution absolument différente de celles qu’ils présentent maintenant. Les traits principaux du futur substratum de Paris ressemblaient beaucoup à ceux qu’on retrouverait aujourd’hui dans les régions centrales de l’Atlantique.

Peu à peu cependant, le littoral se rapprocha, parce que le sol inondé se souleva progressivement, en repoussant