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le « diluvium » se révèle comme bordant la Seine, à droite et à gauche, sur une grande largeur et comme accompagnant également les affluens du fleuve, Bièvre, rivière de l’Opéra, rivière de la rue des Saussaies et bien d’autres, dont la plupart coulent maintenant sous terre, et offrent des particularités en rapport avec les modifications très amples, subies au cours des temps par les méandres de la Seine.

On est frappé de l’énorme lacune stratigraphique partout existante entre l’âge quaternaire des graviers et l’âge dit éocène des masses sous-jacentes. Toutes les formations dépendant des temps qualifiés de miocène et de pliocène manquent totalement, et il en résulte des conséquences très curieuses.

Il faut en effet admettre, pour rendre compte de leur absence, ou bien que ces formations n’ont jamais existé dans la zone aujourd’hui parisienne, ou bien qu’ayant existé elles ont été ultérieurement supprimées avant l’extension des dépôts quaternaires. Tout à l’heure, le diluvium nous faisait remonter à un moment où les rives de la Seine étaient habitées par des troupes d’éléphans à fourrure. Nous pouvons nous demander maintenant quelles conditions avaient précédé celles-là.

Les documens nouvellement recueillis nous permettent de penser que la période depuis laquelle la région de Paris est continentale, a été prodigieusement longue. Déjà à la fin des temps tertiaires la vallée de la Seine était différenciée, et il reste encore çà et là des lambeaux de diluvium de cette époque renfermant des débris d’animaux qui ont précédé la faune quaternaire et parmi lesquels figurent les grands hippopotames, qui étaient éteints déjà quand apparurent les mammouths et leurs contemporains.

Depuis lors, la pluie a, sans relâche, fait son œuvre sur le sol et elle a arraché peu à peu, et d’une façon presque occulte, des épaisseurs gigantesques de terrains appartenant à des niveaux tertiaires qu’il n’est plus possible de déterminer. L’énergie de cette ablation ne saurait non plus s’évaluer avec quelque précision, et il faut bien nous résigner, au moins provisoirement, à laisser dans le vague ce qui concerne les époques comprises entre les temps actuels et la période quaternaire ancienne, pour laquelle les documens se sont conservés. Du reste, n’oublions pas que leur conservation est provisoire : si le pays continue longtemps encore à subir le régime continental, ses portions superficielles