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ministère des Colonies ; les jeunes gens qui partent, grâce à des bourses de voyage, pour étudier et pour tenter de rendre, par la brosse ou l’ébauchoir, l’âme, les formes et les couleurs des pays coloniaux, nous la rapporteront peut-être, quelque jour, de leurs lointaines méditations sous les grands arbres des pays chauds ou dans les mornes steppes du Soudan saharien. Il était nécessaire, en attendant, de ne pas laisser passer inaperçu l’heureux effort fait par les créateurs de l’Exposition de Marseille pour associer les beaux-arts à cette grande manifestation de la vie nationale et pour hâter la formation et l’éclosion d’un art colonial qui chercherait ses inspirations dans les mœurs et dans les monumens des peuples d’Asie ou d’Afrique et qui emprunterait sa lumière au ciel des tropiques.


V

« À l’Exposition coloniale, nous disait, là-bas, un « colonial, » ce que l’on voit le plus, c’est Marseille, et ce qui apparaît le moins ce sont les colonies. » Exagération qu’excuse le soleil marseillais et qui méconnaît ce que nous avons précisément essayé de montrer, à savoir que l’intérêt et la nouveauté de l’Exposition consistent beaucoup moins dans l’entassement de produits coloniaux que dans la démonstration concrète de ce que le travail des colonies peut apporter de prospérité à la métropole et, réciproquement, des réformes, des institutions nouvelles, des travaux, que les colonies attendent de celle-ci. Mais, cet enseignement une fois tiré d’une tournée à travers les palais et les pavillons, il faut reprendre la visite en détail pour constater les progrès de chacune des grandes sections de notre empire colonial. Ici la tâche du chroniqueur devient plus difficile : il ne saurait retracer, même imparfaitement, les résultats de six années d’efforts ; il risque soit de descendre dans trop de détails, soit de passer sous silence des faits considérables. Il doit se contenter d’aperçus généraux et, s’il vient à s’attarder à l’une de nos colonies, se résigner à en négliger d’autres.

Une simple promenade à travers l’Exposition permet d’apercevoir les grandes lignes et les traits caractéristiques de l’œuvre coloniale de ces six dernières années. C’est d’abord l’organisation des grandes unités administratives, des grands gouvernemens que l’on serait tenté d’appeler des vice-royautés : ce sont, sans