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gloire de métropole de l’empire colonial français : l’Exposition est une démonstration. Sans doute, les inévitables « attractions, » tobogan, montagnes russes, danse du ventre, y occupent une place, mais cette place est relativement discrète : ne faut-il pas attirer la foule, amuser les badauds et les enfans ? Et leur présence n’enlève pas à l’Exposition son caractère éducatif et pratique. Disons tout de suite, pour n’y pas revenir, que le cadre est charmant et l’aménagement général très heureux. Comme voies d’accès, les larges avenues du Prado, avec leurs épais ombrages de platanes, sillonnées de tramways dont Paris aurait profit à imiter la bonne organisation et les prix démocratiques ; comme fond de tableau, les collines brûlées, mais si éclatantes de lumière quand elles reflètent les ardeurs du couchant, qui entourent la ville, et ferment sa rade ; comme décor, de belles allées fleuries et ombragées où s’élèvent, dans la verdure, les palais coloniaux aux architectures originales et variées, assez rapprochés les uns des autres pour former un ensemble très vivant, assez éloignés pour ne pas choquer, les yeux par l’incohérence de leurs styles et le disparate de leurs aspects ; à quelques minutes, la mer, cette Méditerranée qui porta jadis les galères de Phocée et qui fut la grande route du commerce de tous les temps, vient doucement mourir au pied des collines couronnées de pins, sur les rochers de la Corniche ; et, fondant les couleurs trop crues dans l’éclat de ses rayons, le bon soleil de Provence jette à profusion sa joie et sa lumière sur ces palais de toutes les civilisations, sur ces vêtemens de tous les climats, ces hommes de toutes les races et ces peaux de toutes les nuances.


I

Le premier projet de l’Exposition est né à Marseille, de la rencontre de deux hommes dont l’activité s’exerce avec une égale autorité et un pareil bonheur, dans les domaines les plus différens ; l’un, le docteur Heckel, directeur de l’Institut et du Musée colonial de Marseille, met au service de l’expansion coloniale la grande compétence scientifique et le zèle professoral que les savans de tous les pays s’accordent à lui reconnaître ; l’autre, M. J. Charles-Roux, ancien député, directeur de la compagnie Transatlantique, président du comité de Madagascar, a été l’un des initiateurs et reste l’un des plus actifs ouvriers du grand