Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/790

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

épiscopales : prédications, ordinations, confirmations…, mais il n’avait aucun titre, aucun droit à contrôler la manière dont les curés, par exemple, prêchaient et remplissaient les autres devoirs de leur charge… Quant à ce qu’on appelle l’administration spirituelle, le ministère pastoral, ils étaient remplis par des vicaires généraux, catholiques et prêtres, à la nomination du chapitre, » et auxquels le pseudo-évêque abandonnait un peu, le moins possible, de ses revenus.

Ernest-Auguste devait à une clause du traité de Westphalie l’assurance de figurer un jour parmi ces prélats pour rire. Au cours des négociations difficiles qui précédèrent le traité, la maison de Brunswick « avait renoncé pour faciliter la paix à la coadjutorerie de Brème et de trois autres églises[1]. » On lui donna en compensation la coadjutorerie d’Osnabrück ; mais, les princes de cette maison « étant tous hérétiques[2], » tandis que la population, et même le chapitre de la cathédrale, étaient moitié catholiques et moitié protestans, on imagina, pour contenter tout le monde, un « expédient » que Rome qualifia de « pernicieux, » et qu’il est aussi permis de nommer burlesque. Il fut arrêté qu’Osnabrück aurait alternativement « un évêque catholique et un hérétique, » ce dernier pris exclusivement dans la maison de Brunswick ; disposition qui a subsisté jusqu’au XIXe siècle : c’est en 1803 que le dernier des évêques protestans, un duc d’York, oncle de la reine Victoria, mit fin à cette situation bizarre en cédant Osnabrück au Hanovre.

En attendant la mort du cardinal de Wartemberg, Ernest-Auguste habitait avec son frère le duc George-Guillaume, souverain du Hanovre. Ce fut chez lui qu’il mena sa jeune femme. Une correspondance très active[3]s’engagea aussitôt entre cette dernière et Charles-Louis, et il y fut question de Liselotte dès les premières lettres, car, de plus en plus, les choses allaient de travers à Heidelberg. L’Électrice Charlotte se refusait absolument à retourner dans sa famille. Exaspérée et douloureuse, elle

  1. Ce qui suit est emprunté à une longue dépêche du 7 mai 1678, adressée par le cardinal Alderano Cibo, secrétaire d’État du pape Innocent XI, à Francesco Buonvisi, archevêque de Thessalonique et nonce à Vienne. Archives du Vatican, tome 198, Nunziatura di Germania.
  2. Cela dépendait du moment. L’un des frères d’Ernest-Auguste s’était fait catholique.
  3. Voyez plus haut, p. 767. Cette correspondance se poursuivit sans interruption jusqu’à la mort de Charles-Louis en 1680.