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consentent des avances pour fonds de roulement, peuvent réescompter tout ou partie de leur portefeuille à la Banque de France ou aux grands établissemens de crédit ; leur papier portant trois signatures, celles de l’emprunteur, de la société locale et de la caisse, est bancable, circulant, vivant, produisant tous effets légaux. Il va de soi que toute spéculation demeure interdite aux caisses régionales. Quant à la loi du 25 décembre 1900, elle stipule que les caisses régionales pourront recevoir de l’Etat des avances égales au quadruple de leur capital versé en espèces.

Enfin une loi du 18 juillet 1898 a créé un nouvel instrument de crédit sur gages, le warrant agricole que les agriculteurs peuvent escompter dorénavant et utiliser au même titre que le commerçant ou l’industriel utilisent le warrant commercial : voici les produits agricoles susceptibles d’être warrantés : céréales en gerbe ou battues, fourrages secs, légumes secs, fruits séchés et fécules, matières textiles, animales ou végétales, graines, vins, cidres, eaux-de-vie et alcools de nature diverse, cocons, bois exploités, résines et écorces à tan, fromages, miels et cires, huiles végétales, sel marin. Ainsi le cultivateur pourrait aujourd’hui emprunter sur ses récoltes en grange ou en grenier, et attendre le moment opportun pour la vente : mais cette loi jusqu’ici n’a rien produit, car elle méconnaît certains obstacles pratiques, la difficulté du contrôle pour le prêteur un peu éloigné, le gage de celui-ci disparaissant si l’emprunteur le vend dans une foire, le privilège du bailleur qui prime le droit du porteur de warrant ; par-dessus tout, les formalités, lenteurs et frais qu’entraîne la constitution d’un warrant. La réforme en a déjà été discutée par le Sénat, et il semble fort difficile d’aboutir. On propose que le prêteur puisse exiger le dépôt des produits dans les magasins d’un syndicat ou chez une tierce personne à sa convenance, si l’emprunteur ne lui inspire pas confiance. Cela suffira-t-il pour vivifier une loi anémique ? Peut-être.

Les véritables apôtres du crédit agricole n’avaient pas attendu cette double manne financière tombant de l’Empyrée législatif, pour se mettre à l’œuvre : ici comme ailleurs, M. Louis Milcent et d’autres propriétaires du Jura, le marquis de Froissard, M. Alfred Bouvet, s’étaient mis à la tête du mouvement syndical dans le Jura, et les premiers donnaient l’exemple. Ils