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ni pouvoir pour retirer l’argent. A la succursale de Magenta, Léon Say vit une jeune fille apportant une somme de 9 lires au nom d’une société composée de quatre de ses amies et de cinq garçons, qui formaient une cagnotte et donnaient 1 lire par semaine pour faire plus tard une excursion.

Il convient de rappeler aussi l’Association des banques populaires avec l’Union Militaire (la plus importante des Coopératives après le Navy and Army Store) qui non seulement a réduit de 25 à 30 p. 100 le coût de la vie pour ses membres officiers, mais encore a entrepris l’exportation de vins purs à types constans, huiles, beurres, fromages, légumes, les offrant aux coopératives de consommation étrangères, et les faisant produire par des coopératives indigènes.

Le crédit agricole est un des modes du crédit personnel, et bien qu’il entraîne quelques risques, puisqu’on prête ici non à la terre, mais au travail, il réussit plus facilement que le crédit ouvrier. L’homme de la terre ne s’en isole pas, on la sent derrière lui, protectrice, nourricière et amie, fournissant une espèce de garantie morale, et le principal, l’éternel moyen de travail. Sa grande ombre plane sur ses fils, et elle demeure pour eux l’instrument du crédit, de la résurrection par le travail. M. Enea Cavalieri a dit justement : « Tout prêt réclame deux signatures : ici le paysan en donne une ; la terre donne l’autre. »

Le prêt agricole en Italie exige en général un triple concours : le syndicat agricole dont fait partie l’emprunteur, le professeur d’agriculture, nommé là-bas le titulaire de la chaire ambulante, qui est l’homme du pays, de la région, et non l’homme de l’autorité centrale comme chez nous, choisi, subventionné, dirigé, stimulé, contrôlé, par les autorités locales. Différence considérable qui entraîne des conséquences non moins importantes et tout à l’avantage de nos voisins ; l’Italien peut opposer son veto, examine tout d’abord l’utilité de l’achat, la moralité de l’emprunteur, et, après la livraison des fonds, surveille minutieusement leur emploi. Enfin la Caisse d’épargne ou Caisse agraire qui proie les fonds, débite le syndicat agricole et le crédite quand l’argent est rendu. Les Caisses n’ont en général qu’un compte unique avec le syndicat agricole. Comme on voit, le professeur d’agriculture, qui va prêchant les bons usages du crédit (cattedra ambulante), est la cheville ouvrière de l’opération. Il y a là, selon le mot de M. Rayneri, « un surcroît de garantie,