Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 35.djvu/599

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

préparation et onze mois de discussion. On s’était occupé, entre temps, de questions d’un ordre plus sensationnel.

Pendant cette première période, — nous l’avons dit plus haut, — le parti socialiste australien s’appliqua à battre en brèche le principe de la concurrence. Il fallait commencer, évidemment, par la concurrence du dehors. On aviserait plus tard à supprimer la concurrence intérieure. Les avantages que recueilleraient les ouvriers d’une campagne contre le commerce n’étaient pas très certains ; mais, n’ayant sur la puissance d’achat du numéraire et les conditions de stabilité des entreprises que des idées plutôt vagues, et considérant avant tout le chiffre des salaires, les chefs du parti eurent peu d’hésitations. Au surplus, l’isolement de l’Australie était nécessaire au succès des nouvelles expériences. A leur instigation, le gouvernement fédéral déposa trois projets de loi : le Customs bill (règlement du service des douanes), le Post and Telegraph bill (règlement sur le service des postes), et l’Immigration restriction bill, concernant l’immigration.

A première vue, on comprend que ce dernier projet put servir la politique du labour party, on s’explique moins comment il en pouvait être de même de simples règlemens sur les douanes et les postes. Ils la servirent cependant, et fort bien ; non par leurs conséquences directes, mais par l’impression produite au dehors. Ces projets de loi, en effet, n’étaient pas de simples règlemens. Ils jouèrent le rôle de ces détachemens d’avant-garde, audacieusement engagés, qui apprennent à l’ennemi que la guerre est déclarée, l’offensive décidée et le contact pris.

Voyons d’abord ce qu’était le Customs bill, devenu Customs Act, en vertu de l’assentiment royal, le 3 octobre 1901.

Le gouvernement fédéral avait réuni dans un même département ministériel le commerce et les douanes. Le service douanier étant fiscal, ses intérêts sont opposés à ceux du commerce. Il était donc inconséquent de les placer sous la même direction. Le choix de la personne chargée de ce département permet de supposer que cette erreur de principe ne fut pas tout à fait involontaire. Le titulaire de ce double portefeuille fut M. Kingston, qui le conserva jusqu’en juillet 1903. M. Kingston n’appartenait pus au labour party, non plus qu’aucun de ses collègues ; mais plus qu’aucun d’eux, il avait les sympathies des socialistes et les méritait. C’est sans doute pour justifier leur confiance qu’il se