Conmiittee, devenu le Labour Party, les théoriciens socialistes développeront-ils leur autorité aux dépens des représentans des Trade Unions ? L’utilitarisme social, dont la méthode progressiste, le programme fragmentaire et la tactique indépendante paraissent répondre aux caractères de ce syndicat d’intérêts, redeviendra-t-il plus abstrait et plus absolu, sous la poussée d’un réveil du socialisme européen ? Ou, au contraire, ces besoins concrets et ces tendances conciliantes s’élargiront-ils au point de faciliter une fusion avec la doctrine radicale, victorieuse elle aussi des rigidités et des abstractions du libéralisme classique ? Il est difficile de répondre. Seule une crise commerciale, d’une intensité prolongée, pourrait, par les souffrances provoquées et les colères éveillées, imposer une réaction politique et intellectuelle, un retour à la tactique révolutionnaire et au dogmatisme intransigeant, qui paraissent contraires aux tendances actuelles de l’activité sociale et de la vie psychologique. Une société, où l’aristocratie ouvrière tend de plus en plus à se constituer en une petite bourgeoisie correcte et éduquée, plus aisée et plus vigoureuse que les classes moyennes, peut assister à une coalition entre les travailleurs spécialisés, et les petits boutiquiers et journaliers agricoles, ces soldats de l’armée libérale. Un tempérament, repris par son dédain séculaire des idées générales et son culte traditionnel de l’utilitarisme concret, est tout naturellement préparé à préférer aux constructions abstraites, à la logique absolue d’un socialisme théorique, les réformes immédiates et les transactions conservatrices du radicalisme. De l’autre côté de la Manche, tout, dans la société et dans l’individu, est sacrifié à l’activité du vouloir discipliné. La paix sociale en sera sans doute la légitime récompense.
JACQUES BARDOUX.