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que ce décime porte sur les mêmes parts nettes que la surtaxe de 30 pour 100 ; la très grande majorité des héritiers ou légataires n’y sera donc point soumise. » Il résulte de ces majorations cumulées le tableau précédent qui est trop intéressant pour qu’on ne le soumette pas au lecteur.

Il suffit de jeter les yeux sur ce tableau pour voir que le mot de confiscation n’est pas exagéré en présence d’une taxation aussi formidable. C’est à croire que M. Poincaré aura négligé de se faire présenter ces calculs : en tout cas, l’Exposé des motifs et les Documens annexes ne les contiennent pas ; ils nous eussent épargné la peine fastidieuse de les faire. On y voit que sur 84 taux de taxation, qui s’appliquent aux taxes successorales, le taux de 10 pour 100 est atteint ou dépassé dans 63 cas ; le taux de 15 pour 100 lest dans 50 cas ; le taux de 20 pour 100 l’est dans 32 cas ; celui de 25 pour 100 est atteint ou dépassé dans 13 cas ; celui de 27 pour 100 l’est dans 6 cas, enfin, celui de 28 pour 100 l’est dans 2 cas.

Ce qui donne encore un caractère plus épouvantable à ces appropriations indues du fisc, véritables vols auxquels on prétend donner une sanction légale, c’est que, quand il s’agit de propriétés immobilières, bâties ou non bâties, la base d’évaluation qui sert à l’établissement de l’assiette des droits est fort exagérée : on multiplie, en effet, le revenu, sans aucune déduction des charges ou impôts, par vingt pour la propriété bâtie et par vingt-cinq pour la propriété non bâtie, ce qui fait ressortir en général la valeur fiscale à un cinquième ou un quart, parfois à un tiers ou moitié, au-dessus de la valeur vénale ou réelle. Tous les taux ci-dessus doivent donc être, dans la pratique, relevés d’un cinquième ou d’un quart au moins quand il s’agit d’immeubles.

Tenons-nous-en, toutefois, aux taux officiels, on voit que l’on arrive au taux de 10 pour 100 entre époux dès que la part héréditaire dépasse 1 million ; on franchit 15 pour 100 entre frères et sœurs dès que la part héréditaire excède 100 000 francs et on dépasse 17 pour 100, au même degré de parenté, dès qu’elle excède 1 million. On franchit le taux de 15 pour 100 entre oncle et neveu, dès que la part excède 10 000 francs, et l’on franchit le taux de 18 pour 100 dès qu’elle dépasse 500 000 francs, et enfin on franchit le taux de 20 pour 100 dès qu’elle excède 2 millions : entre grand-oncle ou grand’tante et petit-neveu ou petite-nièce,