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les études qui lui plaisaient, jusqu’à ce qu’à la suite d’un nouvel accident, il restât engravé sur un banc de sable en vue de Dordrecht. Ainsi que le remarque Houbraken, « il aimait, comme la tortue, à porter sa maison avec lui ; » mais il ne devait pas tirer grand profit, pour son art, de ces diverses tentatives, car il ne fut toute sa vie qu’un peintre très médiocre.

On le voit, si consciencieuses qu’elles aient été, les études faites d’après nature par les maîtres hollandais devaient rester fort incomplètes. Elles embrassaient, du moins, tous les aspects de leur pays, et formaient à la longue, dans la représentation du paysage, plusieurs genres distincts pratiqués par des spécialistes : les paysagistes purs, les peintres de marine, d’architecture, d’animaux, etc. Sans parler des italianisans, plusieurs de ces artistes, désireux de se frayer des voies nouvelles, ou amenés par les circonstances de leur vie à s’expatrier, comme Everdingen en Norvège, Roghman dans le Tyrol, rapportaient de ces pays des impressions qu’ils traduisaient avec plus ou moins de fidélité ; quelques-uns même, comme Frans Post, poussaient jusqu’au Brésil.

Reprenant, à leur tour, les traditions du paysage intime, les Anglais ne devaient d’abord entrevoir la nature qu’à travers les œuvres des Flamands ou des Hollandais réunies dans leurs collections. Turner, à ses débuts, imite ces derniers, avant de subir l’influence de Claude Lorrain, un peu atténuée chez lui par les études assez sommaires qu’il fait d’après nature, le plus souvent à l’aquarelle qui, très habilement pratiquée, lui fournit un moyen de notation aussi expéditif que commode. Il appartenait à Constable d’inaugurer et de renouveler, en les complétant, tous ces procédés d’information. Ses études peintes d’après nature embrassent toutes les parties de son art, et jusqu’à la fin de sa vie, il les poursuit avec une ardeur et une conscience extrêmes. De bonne heure, il s’était appliqué à, reproduire les divers aspects du ciel, de manière à se rendre un compte exact des conditions de rythme et de lumière qui régissent la forme des nuages, leur groupement et leur éclairage. Pour lui, le ciel est un des élémens essentiels de la composition, « la clef, l’échelle et le principal organe de l’impression d’ensemble d’un paysage… aussi sa peinture est une difficulté qui passe tout le reste. » En une seule année (1822), « il a peint avec soin une cinquantaine de ces études de ciel, dans des dimensions assez grandes pour