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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




12 juillet.


Les premiers actes de la nouvelle Chambre ne permettent pas encore de la juger, ce qui est heureux pour elle, car le jugement qu’on devrait en porter ne lui serait pas, jusqu’ici, très favorable. On était porté à croire, sans en avoir d’ailleurs aucun indice, que la majorité, se sentant assez forte pour se mettre au-dessus des petites rancunes, serait clémente envers ses adversaires et ne ferait pas de difficulté à les valider. C’était une erreur qui n’a pas tardé à se dissiper : la majorité a montré tout de suite qu’on s’était trompé sur ses dispositions. La règle qu’elle a adoptée est la plus simple du monde : valider ses amis, même lorsque leur élection était entachée de fraude et de violence : invalider ou enquêter les autres. La première partie de cette règle a été appliquée, par exemple, à M. Jaurès, et la seconde à M. Pierre Leroy-Beaulieu. Nous regretterions beaucoup que M. Jaurès ne fit pas partie de la Chambre ; mais une élection comme la sienne aurait été impitoyablement brisée si elle s’était faite au profit d’un membre de la droite, ou même d’un progressiste. Quant à M. Pierre Leroy-Beaulieu, il a été incontestablement élu puisqu’il a été proclamé par la commission départementale : cette preuve nous suffit dans un département où la commission n’a pas l’habitude de proclamer un candidat modéré lorsqu’elle a le plus léger prétexte pour faire autrement, et elle a sous ce rapport la conscience extrêmement large. Il fallait que M. Pierre Leroy-Beaulieu eût été vingt fois élu dans l’Hérault pour y avoir été proclamé : la majorité de la Chambre n’en a pas moins ordonné une enquête sur son élection. Il n’y a rien de pire que ces enquêtes, qui réveillent, raniment, prolongent l’agitation électorale pendant de longs mois : une Chambre équitable ne devrait