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palme, le véritable callou supérieur à celui du cocotier ; il en est de, même de son sucre et de son arack. Qu’on laisse le régime de fleurs se développer, on a des fruits dont l’amande et la pulpe constituent un excellent manger. Leurs sucs, épaissis après cuisson, se solidifient en une pâte qui se débite en tablettes et se consomme ainsi que la pâte de jujube. Si on plante la graine, elle a vite germé, et] la jeune pousse, dès qu’elle atteint un pied de haut, se mange en bouillie. Sa richesse en matières amylacées la rend très nutritive. Le bourgeon terminal de l’arbre est célèbre sous le nom de chou palmiste ; mais cette friandise est assez coûteuse, car on ne se procure une salade qu’au prix de la mort du palmier. Le bois, beaucoup plus compact que celui du cocotier, et incorruptible, est estimé surtout pour les pilotis. La feuille entière, convenablement desséchée, est l’élément fondamental de toute toiture. Ces palmes imbriquées, liées sur les solives des combles, sont imperméables à l’eau du ciel, impénétrables aux rayons du soleil, et par leur légèreté, leur solidité, défient toute comparaison avec les autres matériaux. Avec le limbe on fabrique des éventails, des nattes, des vases qui ne fuient point. Des fibres solides du pédoncule, on tresse des cordes, des ouvrages de sparterie. C’est encore avec ces feuilles que l’on fait les olles, petites tablettes sur lesquelles on écrit à l’aide d’un stylet. Je n’en finirais pas en vérité si je continuais de vous énumérer les vertus des palmiers de l’Inde…


Pondichéry, 9 août 1901.

… Le territoire de Chounambar a failli devenir funeste à mon ami Fouquet, peu s’en est fallu qu’il n’ait été aveuglé par une Anthia. Je n’étais pas revenu de ma tournée dans le Malabar et les Nilghiris, que nous reprenions nos excursions zoologiques autour de Pondichéry. La première Anthia que nous rencontrâmes, vers six heures du matin, grimpait le long d’un acacia épineux. Fouquet se précipita pour la saisir. Mais il avait compté sans le liquide corrosif que ce grand coléoptère lance avec force par derrière, à la manière de nos carabes. Cette émission de liquide s’accompagna d’une explosion aussi forte que la détonation de ces grands brachynes ou bombardiers que l’on nomme des Pheropsophus. Fouquet reçut dans l’œil cette décharge acide, il en demeura plus de trente minutes aveuglé.