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ancêtres sauvages croissent encore dans les forêts du Malabar intérieur, il nous en indique les principaux. La sève devient une boisson fermentée, nutritive et rafraîchissante, une sorte de vin blanc aigrelet dit callou et vin de palme, qui peut se tourner en bon vinaigre. Par évaporation, elle fournit une cassonade noire dont par voie de distillation on obtient l’arack, cette eau-de-vie dont la canaille en général, et mes deux pousseurs en particulier, font une abusive consommation. Avec le tronc on fabrique les charpentes des paillottes ; les palmes en constituent le toit. La noix fraîche est un savoureux comestible, le lait limpide un breuvage délicieux ; la pulpe sèche, râpée, entre dans la composition du carry ; par écrasement, on en extrait de l’huile ; comprimée, elle n’est autre que le copra qui s’exporte par millions de kilogrammes jusqu’en Europe et constitue les tourteaux propres à l’engraissement du bétail. L’enveloppe fibreuse de la noix est un combustible. Que sais-je encore ?

Mais le cocotier compte de nombreux ennemis, parmi lesquels le rat palmiste et aussi un carnassier du groupe des civettes, la martre des cocotiers (Paradoxurus typus) et un autre du genre ratel (Mellivora indica). Ceux-là s’en prennent aux fruits. Le fameux ver palmiste qui semble avoir été le cossus des gourmets de l’antiquité, attaque le tronc. Cette larve blanche, rosée, dodue, est celle d’un gros charançon rougeâtre du genre calandre, le Rhynchophorus ferrugineus. Elle se développe dans le tissu du tronc et, pour se métamorphoser, s’enveloppe d’une coque façonnée de fibres ligneuses qu’elle enroule ingénieusement en spirale. Chacun de ces cocons atteint la taille d’un petit œuf de poule. Un cocon de même nature, mais autrement volumineux, est fabriqué dans le tronc d’autres palmiers par le plus puissant des longicornes de l’Inde, l’Acanthophorus serraticornis. Ce prione géant, dont les plus belles femelles atteignent presque la longueur de la main, attaque le rondier (Borassus flabelliformis), et aussi le talipot (Corypha umbraculifera).

Le premier de ces palmiers est sans contredit l’arbre le plus utile à l’Hindou, qui y trouve d’abord tout ce qui peut servir à construire sa maison : charpentes, parois, toiture, cordes pour relier le tout. La fleur mâle, une fois sèche, est combustible. La fleur femelle donne une sève potable, qui est le vrai vin de