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masses armées. » Ce sera, pour la guerre navale, d’assurer le charbonnage des navires. On en pourrait citer de nombreux exemples. Pendant la guerre hispano-américaine, depuis le commencement jusqu’à la fin, le combustible est resté le souci le plus grave du gouvernement des Etats-Unis. On se demanda longtemps avec anxiété si l’Orégon pourrait embarquer assez de charbon pour prendre part au combat final, et s’il en aurait une quantité suffisante pour échapper à la poursuite éventuelle d’une force navale supérieure. La capture de ce navire isolé pouvait en effet tenter les Espagnols ; mais Cervera n’eut pas le loisir d’y songer. D’autre part, le maintien du blocus de Santiago dépendait de la réponse à cette question : les Américains pourront-ils fournir à leurs navires une quantité suffisante de charbon de bonne qualité ? Rodjestvensky, dans son périple lamentable de la Baltique à Tsou-Shima, se préoccupa surtout du ravitaillement de ses unités. Pour y pourvoir, il nolisa une soixantaine de vapeurs allemands, les échelonna par rendez-vous successifs, en se servant, sinon de nos points d’appui, tout au moins de nos eaux territoriales.

Des navires à courte haleine, comme les bâtimens actuels, ayant à servir une politique dont on agrandit sans cesse les limites, réclament un échelonnement de stations capables de leur fournir du charbon, des vivres et des munitions.

Aussi, les puissances maritimes s’efforcent-elles de créer sur les Océans, des relais sans lesquels il n’est pas de guerre possible.

L’Angleterre, que nous trouvons naturellement au premier rang, a espacé des points d’appui sur les principales routes du globe. L’Allemagne cherche à en créer un dans la Méditerranée ; elle serait aussi, dit-on, sur le point d’installer un dépôt dans l’île de Bornéo. Les États-Unis, instruits par l’expérience, consacrent des sommes importantes à la fortification des dépôts de combustible. En France, depuis de nombreuses années, on a mis cette question à l’ordre du jour, mais sans la traiter avec toute l’activité et la suite désirables. Les créateurs de notre empire colonial, cherchant des débouchés au commerce, nous ont donné des emplacemens propres à la constitution de solides points d’appui, nécessaires à notre action maritime. Voici les principaux, en dehors des cinq ports militaires métropolitains :