Page:Revue des Deux Mondes - 1906 - tome 34.djvu/271

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XVIIIe siècle. J’en félicite vous et moi, et le public. Il y aura, dans cet essai, plus d’idées neuves et justes que dans les ouvrages couronnés présens et à venir. Il m’a parlé (monsieur votre père) des vues sur la civilisation que vous avez, dit-il, renoncé à mettre à la fin de votre essai. Je ne puis trop juger de vos motifs : mais je regrette tout ce que vous avez retranché, et si, — c’est toujours d’après ce que m’a dit monsieur votre père que je raisonne, — si vous n’avez été déterminé que parce que les considérations sur la civilisation étaient d’une longueur disproportionnée au reste de l’ouvrage, cette raison ne me paraît pas suffisante pour vous engager à omettre ce qui certainement aurait été la partie la plus piquante et la plus profonde de vos recherches. Au reste, M. de Barante m’a paru de votre avis : ainsi je suis loin de décider, et ce n’est que mon impression que je vous transmets, impression vague et aventurée, puisque je n’ai point de données précises à cet égard.

Je suis à la fin de mon travail sur Wallstein, que j’envoie à l’impression, dans la semaine prochaine. Après m’être beaucoup tourmenté pour l’arrangement du plan, et l’avoir refondu en entier, je me suis trouvé ramené, à mon grand étonnement, au plan que j’avais adopté dans l’origine. C’est ce qui m’est arrivé plus d’une fois, dans la composition de plusieurs de mes ouvrages. Cependant le travail de cette refonte n’a pas été perdu. Je crois avoir ajouté surtout au caractère de Wallstein plusieurs développemens nécessaires. Ce caractère est le grand défaut de la pièce de Schiller, et de la mienne. Si je n’ai pu y porter remède entièrement, je crois du moins l’avoir rendu moins sensible. Enfin, cette pièce va paraître, telle quelle. Je m’intéresse assez peu au résultat littéraire. Le succès, à ce que je crois sentir, car il ne faut répondre de rien, le succès, dis-je, m’est presque indifférent. Je la publie, parce que j’ai dit que je la publierais, et parce qu’on me talonne pour la publier. Ce sera ensuite l’affaire du public, s’il y en a un, et s’il veut s’en occuper.

Je conçois comment vous trouvez l’abnégation de la volonté une tiède jouissance. Mais il y a moyen de la revêtir d’une sorte de sentiment pareil à celui de l’amour, et alors, à ce que je crois, elle devient une jouissance assez vive, plus vive peut-être que toutes les autres. Il y aurait bien des choses à dire là-dessus ; elles nous mèneraient trop loin. Je ne suis moi-même