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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




29 juin.


Le grand débat sur le socialisme, qui avait été annoncé comme devant remplir les premiers jours de la législature, les a remplis en effet. La Chambre a entendu de longs et d’éloquens discours. Ont-ils influé beaucoup sur son opinion ? Il est permis d’en douter ; mais ils lui ont donné l’occasion de la dégager et de la manifester. Les socialistes faisaient sonner très haut leurs progrès. Où donc les ont-ils faits ? Ce n’est pas dans le pays : ils étaient une cinquantaine dans la dernière Chambre, et ils sont une cinquantaine dans celle-ci. Mais, à défaut du pays, ils espéraient peut-être conquérir la Chambre elle-même, la séduire par la beauté architecturale de leur construction sociale, l’entraîner par l’éclat de leur rhétorique, en quoi ils se sont certainement trompés. L’effet produit a été tout contraire : une majorité formidable s’est immédiatement formée contre eux. Tous les socialistes n’ont peut-être pas partagé les mêmes illusions. Il en est qui, soit par dédain du Parlement, soit par défiance, se sont abstenus de donner dans la bataille. Si M. Jaurès a eu à lui seul la sonorité d’un orchestre, on a remarqué le mutisme et même l’absence de M. Jules Guesde. M. Jaurès a été médiocrement secondé par ses amis. En revanche, il a eu affaire à des adversaires nombreux, habiles, pressans, M. Biétry, M. Clemenceau, M. Paul Deschanel. Et le ministère, demandera-t-on, a-t-il fait connaître ses vues ? On a pu croire qu’il allait le faire lorsque M. Clemenceau est monté à la tribune, mais on s’est demandé s’il l’avait fait lorsqu’il en est descendu. M. Clemenceau a une si vieille habitude de parler pour lui-même et pour lui seul, suivant son humeur et sa fantaisie, qu’il n’y renoncera sans doute jamais. En de certains momens, il a paru oublier la déclaration mi-