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connaissance de ces secrets était toujours inutile ; et lorsque parfois les esprits, pour nous rendre service, ont consenti à nous proposer des remèdes, en cas de maladie, presque toujours l’effet de ces remèdes a été désastreux.

Par tout l’ensemble de ses manifestations, le spiritisme est en dehors de la nature, en dehors de la science. Qu’est-il donc, en réalité ? C’est une question dont l’étude ne relève que de la philosophie, ou, si l’on veut, de la théologie. C’est, en tout cas, une question où M. Lapponi ne se mêle point de répondre. Mais au contraire il se croit tenu de nous avertir, en sa qualité de médecin, des graves dangers qui s’attachent aux pratiques spirites, sans l’ombre d’un avantage pour les compenser. « Aux principes las plus solides de la morale, sociale et individuelle, les entretiens spirites substituent toute sorte de folies, infiniment changeantes et contradictoires. Dans le domaine des idées religieuses, ils n’aboutissent qu’à amener le doute et la confusion. Chez les médiums, et chez ceux qui assistent à leurs opérations, le spiritisme détermine tantôt l’obnubilation, tantôt l’exaltation morbide des facultés mentales ; il provoque des névroses, des névropathies organiques, d’une gravité extrême. La plupart des médiums fameux, et bon nombre de spectateurs assidus des séances spirites, sont morts fous, ou atteints de maladies nerveuses incurables, — pour ne rien dire d’autres dangers, plus sérieux encore, contre lesquels c’est affaire aux théologiens de nous mettre en garde. D’une façon générale, on peut affirmer que le spiritisme est toujours dangereux, autant pour la santé du corps que pour celle de l’âme. C’est un amusement à peu près de même ordre que les jeux de hasard ; et les pouvoirs publics auraient l’obligation de le prohiber rigoureusement, sans la moindre restriction, à tous ses degrés et sous toutes ses formes. »


Telle est la conclusion de l’étude « médico-critique » de M. Lapponi : et j’avoue qu’elle me paraît parfaitement sage. J’ai lu, dans des ouvrages dont je n’ai aucun motif de soupçonner la véracité, le texte complet de certaines communications faites, le plus sérieusement du monde, par les « esprits » de Platon, de Pascal, ou de Mozart : et j’éprouve désormais une véritable angoisse à la pensée que des hommes, de plus en plus nombreux, recourent à une telle source pour se renseigner sur les graves problèmes de leur destinée. Quoi qu’il puisse en être de son origine et de sa nature, le spiritisme, sous la forme qu’il a toujours eue jusqu’ici, me semble être surtout une étrange et déplorable école d’abêtissement ; et s’il me fallait croire que les morts que j’aime sont devenus pareils à ce