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l’aime, disait-il. (La deprecio e pero la quiero.) » Elle, de son côté, ne devait pas lui garder une inexorable rancune. L’ayant reçu beaucoup plus tard dans son palais de Castille, son premier mot de bienvenue fut : « Qu’as-tu fait depuis que je ne t’ai vu ? moi, je me suis bien amusée. » C’était aussi pour nous un ami. Il se montrait reconnaissant à Napoléon III de l’accueil qu’il en avait constamment reçu à Biarritz et à Paris, et il considérait la France comme l’alliée nécessaire de l’Espagne, parce que c’est avec elle seule que celle-ci pourrait réaliser les buts de son ambition légitime.

Le pronunciamiento de Cadix s’étendit à toute l’Espagne. Séville se prononça avec sa garnison, puis Cordoue. Serrano, à la tête des troupes, se dirige sur Madrid, Prim s’embarque pour longer les côtes et y allumer la révolte.


V

Ces nouvelles ne troublent pas d’abord Gonzalès Bravo, à Lequietio, auprès de la Reine, a La lutte mesquine et policière, me déplaît, disait-il, je préfère la grande lutte, jouer résolument du poignard et me battre jusqu’à la mort. » Mais cette belle assurance ne se soutint pas. Il sentit, malgré son courage, qu’il ne pouvait retenir l’armée dans sa main, et qu’il fallait un général pour résister à des généraux. Il demande à être relevé de ses fonctions et conseille de s’adresser à Manuel Coucha (marquis de la Habana) et à son frère Pepe. La Reine l’écoute et appelle le marquis de la Habana, qui a grand’peine à former un ministère. Il y parvient cependant et rassemble une armée de fidèles dont il donne le commandement à Pavia (marquis de Novalische). Sa confiance en cette armée et en son chef ne tarda pas à être déçue. Le 29 septembre au soir il reçoit ce télégramme : « Nos troupes, après vieux attaques pour emporter le pont d’Alcolea, ont été obligées de se replier au moyen d’une retraite par échelons, occupant le soir, après une lutte acharnée de cinq heures, les positions qu’elles avaient quittées le matin. Le général en chef (sérieusement blessé) a remis le commandement au général Paredes. » Coucha transmet aussitôt ces nouvelles à la Reine et l’appelle à Madrid, puis il