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peu près au président du tribunal actuel de cette ville, à 7.000 fr. d’appointemens ; et que les présidens de chambre au parlement de Bretagne, à 10.000 fr. au temps de Henri II, représentent assez les présidens de Chambre actuels à la cour de Rennes, à 10.000 fr. aussi de traitement.

Ces magistrats, pris pour types, étaient payés exactement de même que de nos jours, puisque nous avons évalué, pour chacun d’eux, en francs de 4 grammes et demi d’argent fin, leurs gages exprimés en monnaies anciennes et que nous avons ensuite traduit ces francs intrinsèques en francs de 1906, d’après la différence du prix de la vie autrefois et à présent.

Considérés en eux-mêmes, ces deux traitemens des XIIIe et XXe siècles sont donc pareils. Ceux des présidens à la cour de Rennes sont pareils aussi au XVIe siècle et de nos jours. Ils sont pareils par rapport au coût de la vie, à l’ensemble des dépenses de nourriture, de logement, de vêtement, de chauffage, d’éclairage, etc., aux deux époques. Mais, si on les compare aux traitemens des autres professions, suivant que les autres traitemens ont monté ou baissé, celui du magistrat va nous apparaître plus bas ou plus haut par rapport à eux. Il sera plus haut que jadis vis-à-vis de la solde militaire, qui a baissé ; il sera plus bas vis-à-vis des salaires ouvriers, qui ont monté. Le viguier d’Aix, au XIIIe siècle, était 14 fois plus payé qu’un manœuvre de son temps ; son successeur actuel l’est à peine 10 fois davantage qu’un manœuvre du nôtre. Le président de Rennes, au XVIe siècle, gagnait 18 fois plus qu’un journalier ; son successeur actuel ne gagne pas 14 fois autant.

Ces traitemens sembleront encore fort différens, d’une date à l’autre, si on les rapproche du revenu de ceux qu’on nomme, autour d’eux, des « gens riches ; » parce que les « riches » du XXe siècle sont beaucoup plus riches que ceux du XIIIe ou du XVIe siècle. Enfin, ils différeront énormément, si on les met en parallèle avec les honoraires des professions libérales, aux deux époques, et avec les appointemens que donnent à leurs chefs les entreprises commerciales et industrielles.

Aux deux derniers siècles de la monarchie on trouverait encore — en petit nombre — des traitemens judiciaires offrant quelque ressemblance avec ceux de nos contemporains : il y a deux cents ans le conseiller au Parlement touchait 10.400 fr., à Paris, où le conseiller à la cour d’appel d’aujourd’hui en touche 11. 000. Et,